e de Saint-Gildas, lui aussi homme religieux, et le
plus eminent recteur des ecoles ou affluaient les hommes lettres de
presque toute la latinite[162]."
[Note 161: La date est donnee par la chronique du monastere de
Morigni: "Anno incarnati Verbi MCXXX, XIII kal. februarii." (_Ex Chron.
mauriniac, Rec. des Hist._, t. XII, p. 80.)]
[Note 162: _Ex Chron. maur., ibid._--Voyez aussi dans le meme
volume, p. 59 et 60; Suger, _De vit. Ludov. Gross._; le t. XII de la
_Gall. Christ._, p. 45; l'_Histoire de saint Bernard_, par Neander, l.
II; et l'_Histoire litteraire de la France_, t. XII, p. 218-220.]
Abelard vit donc a cette epoque le chef de la chretiente; il forma des
relations directes avec des membres du sacre college; il figura, avec
saint Bernard, parmi les plus illustres representants de l'Eglise
gallicane. Sans doute l'interet de son etablissement du Paraclet n'etait
pas etranger a son voyage. Il venait solliciter pour cette institution
naissante l'autorisation et la benediction du successeur de saint
Pierre; et, en effet, la meme annee, le 28 novembre, nous voyons que,
pendant le sejour qu'a son retour de Liege Innocent II fit a Auxerre, il
delivra a ses bien-aimees filles en Jesus-Christ, Heloise, prieure, et
autres soeurs de l'oratoire de la Sainte-Trinite, un diplome qui leur
assurait la propriete entiere et sacree de tous les biens qu'elles
possedaient et de tous ceux que leur pourrait conceder la liberalite des
rois ou des princes, avec peine de decheance et de privation du corps et
du sang de Notre-Seigneur Jesus-Christ contre quiconque oserait attenter
dans l'avenir a leurs droits ou possessions.
Ainsi fut fonde le celebre institut du Paraclet, dont Heloise, a
vingt-neuf ans, fut la premiere abbesse. Du moins le devint-elle de
fait; car bien qu'elle ne recoive que le titre de prieure, dans la bulle
du pape, elle n'avait point de superieure; une seconde bulle, datee de
1136, la designe sous le nom d'abbesse; une troisieme appelle du nom
de monastere du Paraclet l'oratoire de la Sainte-Trinite[163]; le
saint-siege, dans sa prudence, ne craignit donc pas de consacrer cette
invocation au divin Consolateur dont le prejuge avait fait un crime a la
reconnaissante piete d'Abelard.
[Note 163: _Ab. Op., literae seu diplom._, p. 346-348.]
Dans les premiers temps, l'abbesse et ses soeurs menerent une vie de
privations; mais elles priaient avec ferveur, le Saint-Esprit sembla les
secourir. Le respect et l'affect
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