au chemin de
fer pour faire route ensemble.
LE SOLDAT.--Tres flatte, Monsieur. Mais je vais a Domfront pour prendre
la correspondance du chemin de fer...
LE GENERAL.--Et nous aussi. Parbleu! ca se trouve bien; nous partirons
demain! tous trois militaires! Ca ira Bien!
LE SOLDAT.--Il faut que je parte tout de suite, Monsieur; on m'attend ce
soir meme pour une affaire importante. Bien fache, Monsieur! nous nous
retrouverons a Bagnoles.
Le soldat porta la main a son kepi et sortit avec le meme air grave et
triste qu'il avait en entrant. Sur le seuil de la porte, il apercut
Jacques et Paul qui rentraient en courant. Il tressaillit en regardant
Jacques, le suivit des yeux avec interet et ne se mit en route que
lorsqu'il eut entendu Jacques dire a Mme Blidot:
"Maman, M. le cure est tres content de moi."
Jacques fit voir ses notes et celles de Paul; elles etaient si bonnes
que le general voulut absolument leur donner a chacun une piece d'or.
"Prenez, mes enfants, prenez, dit-il; c'est l'adieu du prisonnier; ce
ne serait pas bien de me refuser parce que je ne suis qu'un pauvre
prisonnier."
JACQUES.--Oh! mon bon general, comment pouvez-vous croire...? vous qui
etes si bon.
LE GENERAL.--Alors prenez.
Et il leur mit a chacun la piece d'or dans leur poche.
La journee s'acheva gravement; le general etait presse de partir et
allait sans cesse deranger ses affaires, sous pretexte de les arranger.
Moutier et Elfy etaient tristes de se quitter. Mme Blidot etait triste
de leur tristesse. Jacques regrettait son ami Moutier et meme le general
qui avait ete si bon pour lui et pour Paul. On se separa en soupirant,
chacun alla se coucher. Le lendemain on se reunit pour dejeuner; il
fallait partir avant neuf heures pour arriver a temps.
"Allons, dit le general se levant le premier, adieu, mes bonnes
hotesses, et au revoir."
Il embrassa Mme Blidot, Elfy, les enfants et se dirigea vers la porte.
Moutier fit comme lui ses adieux, mais avec plus de tendresse et
d'emotion Et il suivit le general en jetant un dernier regard sur Elfy.
XIV
Torchonnet se dessine.
Jacques pleurait encore le depart de son ami, Paul lui essuyait les yeux
avec son petit mouchoir et le regardait avec anxiete. Elfy etait allee
ranger la chambre de Moutier, Mme Blidot mettait en ordre celle du
general qui avait tout jete de tous cotes.
"A-t-on idee d'un sans-souci pareil? dit Mme Blidot. Il n'a rien range;
jusqu'a sa cassette qu'il a
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