laissee ouverte. Tous ses bijoux, ses
decorations en pierreries, son service en vermeil! Les voila a droite, a
gauche; c'est incroyable! Et c'est moi qui vais avoir a repondre de tout
cela! Quel drole d'homme! Je parie qu'il ne sait pas seulement ce qu'il
a."
Pendant qu'elle cherchait a rassembler les objets epars, Jacques entra.
JACQUES.--Maman, voici Pierre Torchonnet qui est en colere apres moi
de ce que je ne l'ai pas averti que le general partait; ai-je eu tort,
croyez-vous?
MADAME BLIDOT.--Mais non, mon enfant, tu n'avais pas besoin d'avertir
Torchonnet; pourquoi faire?
JACQUES.--Il dit que le general l'aurait emmene.
MADAME BLIDOT.--Emmene? En voila une idee!
Torchonnet entre dans la chambre.
TORCHONNET.--Oui, certainement, il m'aurait emmene puisqu'il voulait me
prendre pour fils; c'est le cure qui l'en a empeche. Et si j'etais venu
a temps ce matin, je serais parti avec lui; le cure n'a aucun droit sur
moi, il ne peut pas empecher le general de me prendre.
MADAME BLIDOT.--Torchonnet, ce que tu dis la est tres mal. M. le cure
a bien voulu te prendre quand, tu etais malheureux et abandonne, Il te
garde par charite et pour ton bonheur.
TORCHONNET.--Et moi je ne veux pas rester avec lui. J'ai bien entendu ce
que le general disait et ce que le cure repondait; il m'a empeche d'etre
riche et d'etre un monsieur, et moi je ne veux pas rester chez lui a
travailler et a m'ennuyer. Je veux qu'on me mene au general.
MADAME BLIDOT.--Il me semble, mon garcon, que ta langue s'est bien
deliee depuis hier; tu n'etais pas aussi bavard ni aussi volontaire
quand tu etais chez ton maitre.
TORCHONNET.--Je n'ai plus de maitre et je n'en veux plus. Je veux aller
rejoindre le general.
MADAME BLIDOT.--Eh bien! va le rejoindre si tu peux, et laisse-nous
tranquilles. Mon petit Jacques, viens m'aider a serrer tout cela.
TORCHONNET.--Qu'est-ce que vous avez la? Ce sont les affaires du
general. S'il me prend pour fils, tout sera a moi. Pourquoi les
avez-vous prises? Je le dirai aux gendarmes quand je les verrai.
MADAME BLIDOT.--Dis Ce que tu voudras, mauvais garcon, mais va-t'en:
laisse-nous faire notre ouvrage.
Torchonnet, au lieu de s'en aller, entra plus avant dans la chambre, et,
sans que Mme Blidot et Jacques s'en apercussent, il saisit une timbale
et un couvert de vermeil et les mit sous sa blouse, dans la poche de son
pantalon.
Jacques aidait Mme Blidot a remettre en place les pieces du necessaire
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