ous invite tous! Suivez-nous, mes amis."
Chacun s'empressa d'accepter l'invitation, et on arriva en grand nombre
a l'auberge Bournier. Au moment ou ils furent en face de la porte, la
toile de l'enseigne fut tiree et la foule enchantee put voir un tableau
representant le general en pied; il etait en grand uniforme, couvert de
decorations et de plaques. Au-dessus de la porte etait ecrit en grosses
lettres d'or: Au General reconnaissant. La peinture n'en etait pas de
premiere qualite, mais la ressemblance etait parfaite, et la vivacite
des couleurs en augmentait la beaute aux yeux de la multitude. Pendant
quelques instants on n'entendit que des bravos et des battements de
mains. Au meme instant le cure parut sur le perron; il fit signe qu'il
voulait parler. Chacun fit silence.
"Mes amis, dit-il, mes enfants, le general a achete l'auberge dans
laquelle il aurait peri victime des miserables assassins sans le courage
de M. Moutier et de vous tous qui etes accourus a l'appel de notre brave
sergent. Il a voulu temoigner sa reconnaissance a la famille qui devient
celle de Moutier, en faisant l'acquisition de cette auberge pour
repandre ses bienfaits dans notre pays; bien plus, mes enfants, il a
daigne consacrer la somme enorme de cent cinquante mille francs pour
reparer et embellir notre pauvre eglise, pour fonder une maison de
Soeurs de charite, un hospice, une salle d'asile et des secours aux
malades et infirmes de la commune. Voila, mes enfants, ce que nous
devrons a la generosite du General reconnaissant. Que cette enseigne
rappelle a jamais ses bienfaits.
Les cris, les vivats redoublerent. On entoura le general, on voulut le
porter jusqu'en dedans de la maison. Il s'y opposa d'abord avec calme et
dignite, puis la rougeur aux joues, avec quelques jurons a mi-voix et
des mouvements de bras, de jambes et d'epaules un peu trop prononces,
puis enfin par des evolutions si violentes que chacun se recula et lui
laissa le passage libre.
On monta le perron, on entra dans la salle; Elfy et Moutier se
trouverent en face d'une foule compacte: le notaire, les parents, les
amis, les voisins, tous avaient ete invites et remplissaient la salle,
agrandie, embellie, peinte et meublee. Des sieges etaient prepares en
nombre suffisant pour tous les invites. Le general fit asseoir Elfy
entre lui et Moutier, Mme Blidot a sa gauche, puis Derigny et les
enfants; le notaire se trouvait en face avec une table devant lui. Quand
tout le monde fu
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