guerissez, et, quand vous
verrez bien clair devant vous, vous reviendrez, j'en suis sure. Vous
etes entre le devoir politique et le devoir du coeur. Vous mettez le
premier au-dessus de tout. Oui, quand il est net et bien trace. Mais,
ici, il ne l'est pas, vous le reconnaitrez si vous ne prenez conseil
que de la conscience, sans vous occuper de l'opinion, qui, d'ailleurs,
serait ici pour vous.
Dieu vous donne force et guerison pour ceux qui vous aiment! Pour vous,
en quelque sphere de l'univers que vous soyez, vous y serez heureux et
calme; mais pensez un peu a nous, qui avons peut-etre encore besoin de
vous.
A vous bien tendrement et fraternellement.
G. SAND.
DII
A M. CHARLES DUVERNET, A NEVERS
Nohant, 7 decembre 1861.
Mon cher ami,
J'ai enfin trouve une nuit de loisir pour lire ton roman. Je le trouve
bien; la copie qui, cette fois, est tres bonne, m'a permis de le lire
sans fatigue.
Le sujet est joli et bien soutenu. Les personnages se comportent bien
d'un bout a l'autre, et parlent plus naturellement que de coutume, sauf
la tirade descriptive du jeune abbe a sa tante, que je trouve hors
de place et detruisant la couleur simple et vraie de ces personnages
rustiques. On peut remedier a cet inconvenient en prenant un biais; par
exemple: "Emile voyait pour la premiere fois la poesie des choses qui
l'entouraient, le pre, le soleil, la reverie;" tout ce que tu voudras,
mais c'est l'auteur qui parle; et puis tu ajouteras qu'il "exprimait a
sa tante toutes ces emotions nouvelles dans un langage plus poetique
et plus eleve que de coutume, dont elle fut frappee, et elle lui dit,"
etc., etc.
Benoit est un excellent personnage que l'on aime et qu'il n'est pas
necessaire de faire si laid. Laisse-le _pas beau_, mais sans accuser
trop sa disgrace, puisqu'au bout du compte il epouse. J'approuve ses
boucles d'oreille et son parapluie; mais je trouve qu'il en abuse. Une
plaisanterie trop repetee n'est pas drole a la lecture; trois rappels de
ce parapluie suffiraient: Enfin, quelques longueurs de developpement a
faire disparaitre, quelques negligences de style a revoir.
Ne pas toucher aux combats interieurs du jeune seminariste. Cette
partie-la est la meilleure. Tu vois que je ne critique aucunement le
fond; c'est ce que tu as fait de mieux conduit et de plus sagement
termine; il y a de l'interet, de la verite, et tous les personnages sont
bons.
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