n cote utile comme
preponderance.
Sceptique ou voltairienne, elle avait aussi son esprit de corps, sa
vanite de parvenu. Elle resistait au pretre, elle narguait le noble,
dont elle etait jalouse. Aujourd'hui, elle le flatte; on a releve les
titres et montre des egards aux legitimistes dont on s'est entoure; vous
voyez si on les a conquis! Les bourgeois ont voulu alors etre bien avec
les nobles, dont on avait releve l'influence; les pretres ont fait
l'office de conciliateurs. On s'est fait devot pour avoir entree dans
les salons legitimistes. Les fonctionnaires ont donne l'exemple; on
s'est salue et souri a la messe, et les femmes du _tiers_ se sont
precipitees avec ardeur dans la legitimite; car les femmes ne font rien
a demi.
Depuis un an, tout cela a fait un progres enorme, effrayant, dans les
provinces. Les pretres font des mariages, ils font avoir des dots en
echange de la confession. On a poursuivi des societes secretes qui
ne pouvaient rien, parce qu'on ne s'y entendait pas. La Societe de
Saint-Vincent-de-Paul est tres unie, elle marche comme un seul homme,
elle est la reine des societes secretes. Elle a un pied partout, meme
dans les ecoles, et la moitie des etudiants qui ont siffle About n'ont
pas siffle le pretendu ami de l'empereur, mais l'ennemi bien avere du
cardinal Antonelli; ce que je vous dis la, _je le sais_.
Je crois qu'il est temps encore; mais, dans un an, il sera peut-etre
trop tard. La France a besoin de croire a la force de ceux qui la
conduisent. On lui fait accepter les choses les plus inattendues par ce
prestige. Quand on hesite, quand on s'arrete, elle crie aussitot qu'on
recule, elle le croit, et on est perdu.
Il est bien etrange que, republicaine, je vous dise tout cela, cher
prince; peut-etre ceux de mon parti, ou du moins peut-etre quelques-uns
croient-ils qu'il faudrait dire _tant mieux_. Eh bien, ils se trompent,
ils ne peuvent relever la Republique et, sans s'en apercevoir, ils vont
droit a la Restauration. Alors nous revenons de cent ans en arriere:
l'Italie est perdue, la France avilie, et nous reprenons les charmants
traites de 1815!
Si cela arrive de mon vivant, malgre le peu de forces qui me restera,
j'irai plutot vivre avec vos amis les Hurons que de vivre dans les
parfums de la sacristie.
Cher prince, vous etes dans le vrai: l'Empire est perdu, si l'Italie est
abandonnee; car la question de l'avenir est tout entiere. Vous l'avez
dit avec coeur, avec talent et avec c
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