outent, et vous savez bien que mon coeur est toujours
tout a vous.
J'envoie a Paris chez Pichon, qui y sera dans peu de jours, le premier
volume de l'_Histoire de ma vie_, qu'il m'avait retourne pour que je
pusse y ecrire votre nom. Il y a bien longtemps que cet ouvrage, ou je
vous ai consacre plusieurs pages, est chez lui, attendant l'occasion de
vous parvenir.
Maurice voyage. Il doit etre en route pour les Etats-Unis. Mais je ne
vous en dis pas moins que lui aussi vous aime, car je le sais. Combien
souvent nous avons parle de vous!
Je n'ose plus vous supplier de revenir en France, craignant de vous
blesser dans un parti pris, auquel pourtant votre etat de sante
vous permettrait bien de vous soustraire, a present qu'on doit vous
recommander l'air natal. Faites que j'aie au moins de vos nouvelles et
croyez a mon inalterable affection.
GEORGE SAND.
CDLXXXVII
A MAURICE SAND, A BORD DU _JEROME-NAPOLEON_
Nohant, 27 juillet 1861.
Cher enfant,
Je crois bien que je t'ecris toujours pour rien. Tandis que tes lettres
sont en route pour Nohant, tu as tout le temps de depasser la station
que tu m'indiques pour y repondre. J'envoie donc a tout hasard. Je t'ai
ecrit bien des lettres que tu ne recevras peut-etre jamais. Mais j'ai
recu, ce matin, celle que tu m'ecrivais des Acores. Que te voila donc
loin, cher garcon! Et, a cette heure, combien de centaines de lieues de
plus! Enfin tu te portes bien, tu as beau temps, tu vois les choses les
plus curieuses et les plus interessantes, je recois tes lettres, je me
dis que tu es heureux et je m'arme de tout le courage possible pour ne
m'inquieter de rien. Ma sante est tres bonne, malgre un ete affreux,
tout pareil a celui de l'annee passee. Ta soeur vient de partir, elle a
passe un mois ici. Nous avons Alexandre Dumas fils et Berengere. Nous
parlons bien de toi, comme tu peux croire. Je travaille toujours comme
un negre. Tu sais que c'est preuve de sante. Je te _bige_ mille fois.
L'Exposition est finie, les recompenses sont donnees; rien pour toi, ni
pour Lambert, ni pour Manceau.
Je vas ecrire a madame Villot pour tes aquarelles; mais je doute que son
mari y puisse quelque chose. Je te _bige_ encore; quand donc sera-ce
pour de vrai? Mais sois tranquille et ne t'inquiete pas. Je suis
raisonnable et si heureuse de ce qui te rend heureux! Dis au prince que
je lui ai ecrit plusieurs fois pour toi. J'ai ecrit aussi a Ferri.
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