que ce soit? lui demandai-je: une figure de cire
ou de bois peint?
Il eut alors quelque doute, et appuya son doigt sur la main enflee, qui
se creusa sous cette empreinte.
--Pouah! fit-il, c'est une morte pour de bon! Que ne le disait-elle?
C'etait une petite vieille qui devait rester exposee sur le catafalque
funeraire jusqu'au moment de la sepulture. Elle paraissait au moins
centenaire, et pourtant elle etait tres-belle dans le calme de la mort:
sa peau avait le ton mat et uni de la cire vierge; ses traits, fortement
accentues, n'avaient pas S de sexe, car un duvet, blanc comme la neige,
ombrageait ses levres rigidement fermees. Vetue d'une robe de linge
blanc nouee au cou et aux poignets par des rubans noirs, la tete
ombragee d'un voile de mousseline, qui lui donnait l'aspect d'une
religieuse, elle semblait dormir dans une attitude aisee, les mains
pendantes sur le bord du lit mortuaire. Elle paraissait si recueillie et
si satisfaite dans son eternel sommeil; son mouvement semblait si bien
dire, comme le _Sonno_ de Michel-Ange: _Ne m'eveillez pas!_ qu'elle
donnait envie d'etre mort comme elle, sans convulsion, sans regret,
semblable au voyageur qui trouve enfin un bon lit apres les fatigues
d'une longue route.
Comme je m'etonnais de l'abandon de ce cadavre si proprement arrange et
apporte la en ceremonie, puis tout a coup laisse sans surveillance et
sans prieres dans l'eglise ouverte a la curiosite des passants:
--C'est toujours comme cela, me dit Brumieres. La mort, en Italie, n'a
rien de serieux, les honneurs qu'on lui rend ont plutot un air de fete;
les larmes des parents et des amis n'accompagnent le defunt que jusqu'a
la porte de la maison. Le reste est pour le coup d'oeil, et meme
quelquefois pour la farce. J'ai vu autrefois, sur la grande route de
la Spezia, un pauvre diable que deux hommes portaient au cimetiere. Le
pretre marchait d'un air allegre, regardant les filles qui passaient et
leur souriant, tout en marmottant les prieres d'usage. Derriere lui
et autour de lui, sautait et gambadait, sans qu'il en parut choque ou
seulement etonne, un jeune gars, vetu de la robe noire et masque de la
hideuse cagoule, portant une grande croix de bois noir et remplissant
l'office de _frere de la mort_. Ce garcon faisait mille contorsions
burlesques, courait apres les filles pour les effrayer, et les
embrassait bel et bien sous le nez du pretre, qui paraissait trouver la
chose fort plaisante. Je demandai aux pa
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