sa colere tous les aristocrates composant la reunion. Aussitot
il court transcrire dans son journal cette scene ridicule, qui peint si
bien la situation de Dumouriez, les fureurs de Marat et les moeurs de
cette epoque[1].
[Note 1: Voyez le recit de Marat lui-meme, note 2 a la fin du volume.]
Dumouriez avait passe quatre jours a Paris, et pendant ce temps il n'avait
pu s'entendre avec les girondins, quoiqu'il eut parmi eux un ami intime
dans la personne de Gensonne. Il s'etait borne a conseiller a ce dernier
de se reconcilier avec Danton, comme avec l'homme le plus puissant, et
celui qui, malgre ses vices, pouvait devenir le plus utile aux gens de
bien. Dumouriez ne s'etait pas mieux entendu avec les jacobins, dont il
etait degoute, et auxquels il etait suspect a cause de son amitie supposee
avec les girondins. Son sejour a Paris l'avait donc peu servi aupres des
deux partis, mais lui avait ete plus utile sous le rapport militaire.
Suivant son usage, il avait concu un plan general adopte par le conseil
executif. D'apres ce plan, Montesquiou devait se maintenir le long des
Alpes, et s'assurer la grande chaine pour limite, en achevant la conquete
de Nice, et en s'efforcant de conserver la neutralite suisse. Biron devait
etre renforce, afin de garder le Rhin depuis Bale jusqu'a Landan. Un corps
de douze mille hommes, aux ordres du general Meusnier, etait destine a se
porter sur les derrieres de Custine, afin de couvrir ses communications.
Kellermann avait ordre de quitter ses quartiers, de passer rapidement
entre Luxembourg et Treves, pour courir a Coblentz, et de faire ainsi ce
qu'on lui avait deja conseille, et ce que lui et Custine auraient du
executer depuis long-temps. Prenant enfin l'offensive lui-meme avec
quatre-vingt mille hommes, Dumouriez devait completer le territoire
francais par l'acquisition projetee de la Belgique. Gardant ainsi la
defensive sur toutes les frontieres protegees par la nature du sol, on
n'attaquait hardiment que sur la frontiere ouverte, celle des Pays-Bas, la
ou, comme le disait Dumouriez, on ne pouvait SE DEFENDRE QU'EN GAGNANT DES
BATAILLES.
Il obtint, par le credit de Santerre, que l'absurde idee du camp sous
Paris serait abandonnee; que tous les rassemblemens qu'on avait faits en
hommes, en artillerie, en munitions, en effets de campement, seraient
reportes en Flandre, pour servir a son armee qui manquait de tout; qu'on y
ajouterait des souliers, des capotes, et six millions de nume
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