une bride a mon chapeau.
--Bonne Maman, ma fille, je n'ai donc plus de cravate empesee.
Pendant dix minutes, c'est autour de la charmante aieule un va-et-vient,
des instances. Chacun a besoin d'elle, c'est elle qui tient les clefs de
tout, distribue le joli linge blanc fin tuyaute, les mouchoirs brodes,
les gants de toilette, toutes ces richesses qui, sorties des cartons
et des armoires, etalees sur les lits, repandent dans une maison
l'allegresse claire du dimanche.
Les travailleurs, les gens a la tache la connaissent seuls cette joie
qui revient tous les huit jours consacree par l'habitude d'un peuple.
Pour ces prisonniers de la semaine, l'almanach aux grilles serrees
s'entr'ouvre de distance en distance en espaces lumineux, en prises
d'air rafraichissantes. C'est le dimanche, le jour si long aux mondains,
aux Parisiens du boulevard dont il derange les manies, si triste aux
depatries sans famille, et qui constitue pour une foule d'etres la seule
recompense, le seul but aux efforts desesperes de six jours de peine.
Ni pluie, ni grele, rien n'y fait, rien ne les empechera de sortir,
de tirer derriere eux la porte de l'atelier desert, du petit logement
etouffe. Mais, quand le printemps s'en mele, quand un soleil de mai
l'eclaire comme ce matin, qu'il peut s'habiller de couleurs heureuses,
pour le coup le dimanche est la fete des fetes.
Si on veut bien le connaitre, il faut le voir surtout aux quartiers
laborieux, dans ces rues sombres qu'il illumine, qu'il elargit en
fermant les boutiques, en remisant les gros camions de transport,
laissant la place libre pour des rondes d'enfants debarbouilles et
pares, et des parties de volants melees aux grands circuits des
hirondelles sous quelque porche du vieux Paris. Il faut le voir aux
faubourgs grouillants, enfievres, ou des le matin on le sent planer,
reposant et doux, dans le silence des fabriques, passer avec le bruit
des cloches et ce coup de sifflet aigu des chemins de fer qui met dans
l'horizon, tout autour des banlieues, comme un immense chant de depart
et de delivrance. Alors on le comprend et on l'aime.
Dimanche de Paris, dimanche des travailleurs et des humbles, je t'ai
souvent maudit sans raison, j'ai verse des flots d'encre injurieuse sur
tes joies bruyantes et debordantes, la poussiere des gares pleines
de ton bruit et les omnibus affoles que tu prends d'assaut, sur tes
chansons de guinguette promenees dans des tapissieres pavoisees de robes
vertes et ros
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