anglais,
pleins de dexterite et de tact, auraient voulu voir familierement les
negociateurs francais, et avaient trop d'esprit pour eprouver aucun
eloignement. Au contraire, Letourneur et Pleville Le Peley, honnetes
gens, mais peu habitues a la diplomatie, avaient la sauvagerie
revolutionnaire: ils consideraient les deux Anglais comme des hommes
dangereux, toujours prets a intriguer et a tromper, et contre
lesquels il fallait etre en defiance. Ils ne voulaient les voir
qu'officiellement, et craignaient de se compromettre par toute autre
espece de communication. Ce n'etait pas ainsi qu'on pouvait s'entendre.
Lord Malmesbury signifia ses pouvoirs, ou les conditions du traite
etaient laissees en blanc, et demanda quelles etaient les conditions de
la France. Les trois negociateurs francais exhiberent les conditions,
qui etaient, comme on pense bien, un _maximum_ fort eleve. Ils
demandaient que le roi d'Angleterre renoncat au titre de roi de France,
qu'il continuait de prendre par un de ces ridicules usages conserves
en Angleterre; qu'il rendit tous les vaisseaux pris a Toulon; qu'il
restituat a la France, a l'Espagne et a la Hollande, toutes les colonies
qui leur avaient ete enlevees. En echange de tout cela, la France,
l'Espagne et la Hollande, n'offraient que la paix, car elles n'avaient
rien pris a l'Angleterre. Il est vrai que la France etait assez
imposante pour exiger beaucoup; mais tout demander pour elle et
ses allies, et ne rien donner, c'etait renoncer a s'entendre; Lord
Malmesbury, qui voulait arriver a des resultats reels, vit bien que la
negociation officielle n'aboutirait a rien, et chercha a amener des
rapprochemens plus intimes. M. Maret, plus habitue que ses collegues
aux usages diplomatiques, s'y preta volontiers; mais il fallut negocier
aupres de Letourneur et de Pleville Le Peley, pour amener des rencontres
au spectacle. Les jeunes gens des deux ambassades se rapprocherent les
premiers, et bientot les communications furent plus amicales. La France
avait tellement rompu avec le passe depuis la revolution, qu'il fallait
beaucoup de peine pour la replacer dans ses anciens rapports avec
les autres puissances. On n'avait rien eu de pareil a faire l'annee
precedente, parce qu'alors la negociation n'etant pas sincere, on
n'avait guere qu'a eluder; mais cette annee il fallait en venir a des
communications efficaces et bienveillantes. Lord Malmesbury fit sonder
M. Maret pour l'engager a une negociation particuli
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