federation du 14 juillet. La presence de l'armee
francaise en Italie, ses hauts faits, sa gloire, avaient commence a
repandre l'enthousiasme militaire dans ce pays, trop peu habitue aux
armes. Bonaparte tacha de l'y exciter de toutes les manieres. Il ne se
dissimulait pas combien la nouvelle republique etait faible sous le
rapport militaire; il n'estimait en Italie que l'armee piemontaise,
parce que la cour de Piemont avait seule fait la guerre pendant le cours
du siecle. Il ecrivait a Paris qu'un seul regiment du roi de Sardaigne
renverserait la republique cisalpine, qu'il fallait donner par
consequent a cette republique des moeurs guerrieres, qu'elle serait
alors une puissance importante en Italie, mais que pour cela il fallait
du temps, et que de pareilles revolutions ne se faisaient pas en
quelques jours. Cependant il commencait a y reussir, car il avait au
plus haut degre l'art de communiquer aux autres le plus vif de ses
gouts, celui des armes. Personne ne savait mieux se servir de sa gloire,
pour faire des succes militaires une mode, pour y diriger toutes les
vanites et toutes les ambitions. Des ce jour, les moeurs commencerent
a changer en Italie. "La soutane, qui etait l'habit a la mode pour les
jeunes gens, fut remplacee par l'uniforme. Au lieu de passer leur vie
aux pieds des femmes, les jeunes Italiens frequentaient les maneges, les
salles d'armes, les champs d'exercice. Les enfans ne jouaient plus a la
chapelle; ils avaient des regimens de fer-blanc, et imitaient dans leurs
jeux les evenemens de la guerre. Dans les comedies, dans les farces
des rues, on avait toujours represente un Italien bien lache, quoique
spirituel, et une espece de gros capitan, quelquefois francais, et plus
souvent allemand, bien fort, bien brave, bien brutal, finissant
par administrer quelques coups de baton a l'Italien, aux grands
applaudissemens des spectateurs. Le peuple ne souffrit plus de pareilles
allusions; les auteurs mirent sur la scene, a la satisfaction du public,
des Italiens braves, faisant fuir des etrangers pour soutenir leur
honneur et leurs droits. L'esprit national se formait. L'Italie
avait ses chansons a la fois patriotiques et guerrieres. Les femmes
repoussaient avec mepris les hommages des hommes qui, pour leur plaire,
affectaient des moeurs effeminees[9]."
[Note 9: _Memoires de Napoleon_, publies par le comte de Monthelon, tome
IV, page 196.]
Cependant cette revolution commencait a peine; la Cisalpine ne po
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