onte insurmontable, et si caracteristique chez les ouvriers de
Paris, de tendre la main, meme, et surtout, a la charite publique et
administrative, et toute la tragedie enfin de la misere, de l'inique
misere! Il y a dans un coin du logis une jeune creature de Dieu,
intelligente, aimante, brave. Si elle n'est pas tres jolie, elle a
d'admirables cheveux blonds, et tout, oh! tout, plutot que de les vendre
comme les Auvergnates, au deteste "merlan" qui les guigne. Alors, elle
les noue en torsade, y pique une epinglette de deux sous, se dresse,
embrasse la maman et le mome, et, une, deux, trois, elle y va!... C'est
Louisa.
"Non, il n'y a pas de malhonnetes femmes, interjeta le president
Mazedes.
"--Il n'y a peut-etre, observai-je, que de malhonnetes societes. Mais
l'histoire de Louisa, on la demande?
"--Eh bien! voici. Un jour ou, Themis m'ayant fait des loisirs, je les
employais a jouer au bouchon avec les ablettes de la Marne, j'etais
entre, pour me rafraichir, dans un de ces cabarets a tonnelles qui
bordent la riviere. Ils sont les oasis de nos caravanes fluviales,
et l'attrait dominical des familles d'ouvriers en balade. Outre
les berceaux de lierre et de vigne folle qui y jouent le role du
moucharabieb de la maison arabe, on y trouve des gymnastiques avec
trapezes et balancoires, le jeu de tonneau et de boules, tous les
divertissements de plein air enfin, naifs et chers a nos peres, ou se
resument, pour les bonnes gens du peuple, le plaisirs de la campagne.
Une baignade, une traversee en canot jusqu'a l'ile voisine, et le regal
d'une gibelotte leur en completent le paradis.
"Je triomphais ce matin-la par une peche miraculeuse, et l'idee d'y
faire honneur sur place m'avait amene a ce bouchon de mariniers, ou
m'attirait encore, je l'avoue, le souvenir de certain "reginglard"
angevin qui datait dans ma magistrature.
"--Voici, dis-je au patron de l'oasis, en lui remettant ma cloyere;
faites-moi frire cette goujonnee, et, pour le reste, du meilleur!
"--Parbleu, mon president, vous tombez mal ou bien, selon votre humeur
du jour, nous avons aujourd'hui une noce. Des faubouriens et leurs
dames, tous en joie, et qui menent deja un train du diable. Du reste,
ecoutez-les. Vous ne serez pas tranquille sous votre tonnelle.
"--La mariee est-elle jolie?
"Peuh! Affaire de sentiment. Elle a des cheveux magnifiques et elle
rayonne de bonheur, voila tout ce qu'on peut en dire.
"--Le mari?
"--Un brave garcon. Il est
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