re de sa
mere."
Et Irene alla au rendez-vous. Quelle est celle qui n'y fut allee comme
elle?
La voici dans la serre, a trois heures de nuit, se dirigeant a tatons,
parmi les plantes retombantes. Devant le banc, deux bras l'enserrent en
silence. C'est lui, Jacques.
--Laissez, je ne suis venue que par pitie. J'ai senti que vous vous
tueriez et que cette fois c'etait vrai. Mais j'aime mon mari, il est
bon, genereux et brave. Il m'a pardonne, car il a tout devine, et depuis
sept ans.
--Vous en etes sure, Irene?
--Cette alliance n'est pas mon anneau nuptial et je n'ai pas retrouve
l'autre.
--Et il le sait?
--Je le crois.
--C'est donc un lache?
Deux coups de feu repondent, de la grotte, a la question et a l'injure.
Irene et Jacques s'y precipitent, epouvantes.
--Leon ... mon Dieu!...
Rainville vient de se bruler la cervelle, et du bras deploye, au bout
de la main, entre le pouce et l'index, il tend l'alliance ouverte:
"Leon-Irene, 12 avril 1900", la vraie.
L'HORREUR HUMAINE
Ils deboucherent dans des bois dans le village. Sur un brancard
d'ambulance, quatre d'entre eux portaient le cadavre de l'officier
qu'ils deposerent sur la dalle de la fontaine, au centre de la place, a
mi-cote devant l'eglise, ou leur major lui lava les cheveux et la barbe,
rouges de sang.
La balle du franc-tireur s'etait logee en plein front, comme dans un
carton de cible. Le coup decelait l'embuscade mais ne signait pas le
fusil. Les Bavarois avaient battu futaies, haies et fourres, et ils
n'avaient trouve personne. Or, ni en 1792, ni en 1815, ni en 1870,
les armees invasionnaires n'ont jamais accorde vertu belligerante aux
_Freyschuetz_, et l'Allemagne ne les admet qu'en opera, la paix regnante.
En guerre, elle les fusille.
M. le cure parut sous le portail. Il etait vetu de l'aube et de l'etole.
Il s'avanca, suivi de femmes et d'enfants, vers le capitaine, qui le
salua fort poliment et s'ecarta pour laisser le pretre delivrer au
mort le viatique. Ce devoir apostolique rempli, le pasteur monta au
presbytere, digne et froid, il en tira la porte.
Les Bavarois sont catholiques, ils ont droit a la terre sainte.
L'officier tue fut donc enterre, par les soldats, dans le cimetiere meme
du village. C'etait sans doute un personnage important d'outre-Rhin,
soit par sa valeur propre, soit par sa lignee, car le capitaine parla
devant la fosse faute et, a defaut d'autre verdure, ils y jeterent
des branches d'ifs et de
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