la nage dans le Bosphore. Cherubini,
dit-on, se pique de peindre.
Comme science, il ne nous appartient pas de juger les _Etudes_, et nous
ne hasarderons qu'un mot. C'etait certes une position a prendre, un
point de vue heureux a relever vers cette fin du XVIIIe siecle, que
d'assembler et de deduire les accords, les harmonies animees du tableau
de la nature, et de faire sentir la chaine et, s'il se pouvait,
l'intention de ces douces lois. Charles Bonnet le tenta a Geneve, et
Bernardin de Saint-Pierre en France. On avait tant insiste sur les
desaccords, les bouleversements, les hasards, qu'il y avait nouveaute
a la fois et verite dans ce parti. Bernardin refit en quelque sorte
le livre de Fenelon, en profitant des observations amassees dans
l'intervalle, et en s'arretant avec plus de complaisance sur la nature,
cette oeuvre vivante et cette ouvriere de Dieu [60]. Son livre, et en
general tous ses ouvrages depuis les _Etudes_ jusqu'aux _Harmonies_,
sont en ce sens une espece de compromis entre l'ancien spiritualisme
chretien et l'observation irrecusable, je dirai aussi, le culte
croissant de la nature: dans ses croyances a l'immortalite, il essaye,
par exemple, de donner au ciel chretien une realite naturelle en
faisant aller les ames dans les planetes ou dans le soleil. Mais,
scientifiquement parlant, son point de vue n'etait qu'un apercu heureux,
instantane, un ensemble mele de lueurs vraies et de jours faux, et d'ou
il ne pouvait sortir autre chose que la peinture meme qu'il en offrait,
et l'impression enthousiaste, affectueuse, qu'elle ferait naitre. Le
point de vue des causes finales n'est jamais fecond pour la science, et
rentre tout entier dans la poesie, dans la morale, dans la religion; ce
ne peut etre au plus que le moment de priere du savant, apres quoi il
faut qu'il se remette a l'examen, a l'analyse. Son premier mot une
fois articule, Bernardin de Saint-Pierre ne fit plus que se repeter
en variant plus ou moins ses adorations et ses nuances. Les Jussieu
cependant pour la botanique, Haller, Vicq-d'Azyr, Cabanis pour la
physiologie animale, Lavoisier, Laplace, Berthollet, pour la physique
et la chimie, poussaient dans des voies diverses, en savants, ce qu'il
essayait d'embrasser et de deviner par un compose d'etude ingenieuse,
mais partielle, et d'inductions illusoires. M. de Humboldt, de nos
jours, pour les grandes observations vegetales en divers climats, a
donne sur plus d'un point consistance et realite sc
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