olique et chaste douceur, s'il
faiblit en s'eloignant, ne se perde pas encore, et qu'il continue de
luire longtemps, comme la premiere etoile des belles soirees, au ciel
plus ardent de ceux qui nous suivent!
Octobre 1836.
[Note 67: Nous trouvons, par un hasard singulier, dans un volume
imprime en Suisse (_Melanges de Litterature_, par Henri Piguet,
Lausanne, 1816), une reponse precise a la question que nous nous posions
ici. M. Piguet, jeune pasteur vaudois, enthousiaste de la litterature
et des ecrivains francais, avait fait le voyage de Paris vers 1810;
il desirait passionnement connaitre Bernardin de Saint-Pierre, et lui
ecrivit pour avoir une heure de lui. Dans cette visite tant revee, il
l'assiegea de questions directes et naives:--"Je lui demandai quels
etaient ses meilleurs amis."--"Ma famille et ma muse: mes moments de
verve me font jouir veritablement."--"Vous connaissez sans doute M. de
Chateaubriand, qui a parle de vous avec admiration?"--"Non, je ne le
connais pas; j'ai lu dans le temps quelques extraits du _Genie du
Christianisme_: son imagination est trop forte."--Ceci rentre dans une
observation generale sur laquelle je reviendrai plus d'une fois: c'est
qu'en litterature, en art, on n'aime pas d'ordinaire son successeur
immediat, son heritier presomptif. Michel-Ange traitait volontiers
Raphael d'effemine; Corneille parlait de Racine comme d'un blondin;
Buffon repondait a Herault de Sechelles qui le questionnait sur le style
de Jean-Jacques:--"Beaucoup meilleur que celui de Thomas; mais Rousseau
a tous les defauts de la mauvaise education; il a l'interjection,
l'exclamation en avant, l'apostrophe continuelle." On vient d'entendre
Bernardin de Saint-Pierre, visiblement impatiente, prononcer sur
l'auteur de Rene: "_Imagination trop forte!_"--Toujours et partout la
vieille histoire de Saturne et de Jupiter; toujours les generations
d'autant plus inexorables qu'elles se touchent davantage, et empressees
de se nier l'une l'autre quand elles ne peuvent se devorer! Avertis du
moins, tachons de ne pas faire ainsi.]
Bernardin de Saint-Pierre, qui est l'un de mes auteurs favoris, s'est
retrouve sous ma plume au tome VI des _Causeries du Lundi_, et en plus
d'une page du livre intitule: _Chateaubriand et son Groupe litteraire_.
MEMOIRES
DU
GENERAL LA FAYETTE
(1838.)
I
Nous sommes en retard pour parler de cette publication dont les trois
premiers volumes ont paru depuis deja bien des mois.
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