l le rappelle donc et le maintient en 1800, il le proclame en
1815, il le deploie encore en 1830; et, en definitive, aout 1830 en
a realise assez, dans la lettre sinon dans l'esprit, pour que sa vue
perseverante ait ete justifiee historiquement. Dans sa longue et ferme
attente, tout ce qui pouvait etre etranger au triomphe du drapeau, et en
amoindrir ou en retarder l'inauguration, La Fayette ne le voyait pas,
et peut-etre il ne le desirait pas voir. Son langage etait fait a son
dessein. Un precepte qu'il ne faut jamais perdre de vue en politique,
c'est, quelque idee qu'on ait des hommes, d'avoir l'air de les respecter
et de faire estime de leur sens, de leur caractere; on tire par la d'eux
tout le bon parti possible; et si l'on y veut mettre cette louable
intention, on les peut mouvoir dans le sens de leurs meilleurs
penchants. La Fayette, qui s'etait voue, comme a une specialite, au
triomphe de quelques principes genereux, a pu ne dire dans sa longue
carriere et ne paraitre connaitre de la majorite des hommes, meme apres
l'experience, que ce qui convenait au noble but ou il les voulait
porter. C'a ete une des conditions de son role, en le definissant comme
je viens de le faire; et si c'en a ete un des moyens, il n'a rien eu que
de permis.
[Note 77: Il y aurait pris la plus grande part, s'il n'avait ete en
ce moment a Haguenau: il y adhera tres-vivement a son retour.]
En m'exprimant de la sorte, en toute liberte, je n'ai pas besoin de
faire remarquer combien le point de vue du politique et celui du
moraliste sont inverses, l'un songeant avant tout aux resultats et au
succes, l'autre remontant sans cesse aux motifs et aux moyens.
Sans pretendre suivre en detail La Fayette dans son personnage
politique a dater de 89, j'aurai pourtant a parcourir ses Memoires
pour l'appreciation de quelques-uns de ses actes, pour le releve de
quelques-uns de ses portraits anecdotiques ou de ses jugements. Mais
aujourd'hui j'aime mieux tirer par anticipation, des trois derniers
volumes non publies, et qui vont tres-prochainement paraitre, de belles
pages d'un grand ton historique, qui succedent a de tres-interessants et
tres-varies recits, le tout composant un chapitre intitule _Mes rapports
avec le premier Consul_. Cet ecrit, commence avant 1805, a la priere du
general Van Ryssel, ami de La Fayette, ne fut acheve qu'en 1807 et resta
dedie au patriote hollandais, mort dans l'intervalle. Ces pages, datees
de Lagrange, meditees et tracee
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