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e la passion. Si j'avais ete femme, la cravate de Jacques avec ses mille noeuds qu'il variait a l'infini m'aurait plus touche qu'une declaration. Mais voulez-vous que je vous dise! les femmes n'y entendent rien.... Tous les dimanches, avant de partir, le pauvre amoureux ne manquait pas de me dire: "Je vais _la-bas_, Daniel... viens-tu?" Et moi, je repondais invariablement: "Non! Jacques! je travaille...." Alors il s'en allait bien vite, et je restais seul, tout seul, penche sur l'etabli aux rimes. C'etait de ma part un parti pris, et serieusement pris, de ne plus aller chez Pierrotte. J'avais peur des yeux noirs. Je m'etais dit: "Si tu les revois, tu es perdu", et je tenais bon pour ne pas les revoir.... C'est qu'ils ne me sortaient plus de la tete, ces grands demons d'yeux noirs. Je les retrouvais partout. J'y pensais toujours, en travaillant, en dormant. Sur tous mes cahiers, vous auriez vu de grands yeux dessines a la plume, avec des cils longs comme cela. C'etait une obsession. Ah! quand ma mere Jacques, l'oeil brillant de plaisir, partait en gambadant pour le passage du Saumon; avec un noeud de cravate inedit, Dieu sait quelles envies folles j'avais de degringoler l'escalier derriere lui et de lui crier: "Attends-moi!" Mais non! Quelque chose au fond de moi-meme m'avertissait que ce serait mal d'aller _la-bas_, et j'avais quand meme le courage de rester a mon etabli...: "Non! merci, Jacques! je travaille." Cela dura quelque temps ainsi. A la longue, la Muse aidant, je serais sans doute parvenu a chasser les yeux noirs de ma cervelle. Malheureusement j'eus l'imprudence de les revoir encore une fois. Ce fut fini! ma tete, mon coeur, tout y passa. Voici dans quelles circonstances: Depuis la confidence du bord de l'eau, ma mere Jacques ne m'avait plus parle de ses amours; mais je voyais bien a son air que cela n'allait pas comme il aurait voulu... Le dimanche, quand il revenait de chez Pierrotte, il etait toujours triste. La nuit je l'entendais soupirer, soupirer... Si je lui demandais: "Qu'est-ce que tu as, Jacques?" Il me repondait brusquement: "Je n'ai rien." Mais je comprenais qu'il avait quelque chose, rien qu'au ton dont il me disait cela. Lui, si bon, si patient, il avait, maintenant avec moi des mouvements d'humeur. Quelquefois il me regardait comme si nous etions faches. Je me doutais bien, vous pensez! qu'il y avait la-dessous quelque gros chagrin d'amour; mais comme Jacques s'obstinait a ne pas m'e
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