exemple, on peut, je crois, trouver que dans les oeuvres de M.
Alexandre Dumas fils il y a plus d'esprit que de fantaisie, tandis que
dans certaines oeuvres d'Alfred de Musset il y a plus de fantaisie que
d'esprit. Dans les pieces de M. Meilhac et de M. Labiche, il y a tantot
de l'esprit, et du plus fin, tantot de la fantaisie, et de la plus
originale. Cette association de l'esprit et de la fantaisie est, en
effet, le propre des oeuvres comiques, car les lois de l'esprit et de la
fantaisie semblent etre identiques a celles de la gaiete et du rire,
et consister dans le rapport soudain que l'auteur nous fait apercevoir
entre deux objets les plus disparates d'apparence. A mesure que decroit
le nombre des parties justement associees dans les images mises en
presence, la fantaisie perd de son prix, n'est bientot qu'une sorte
d'imagination vagabonde et dereglee, devient enfin grossiere et tombe
dans ce qu'on appelle familierement la betise, qui n'est autre chose
qu'une contradiction irremediable entre deux images conjuguees. La
betise est donc encore susceptible d'exciter le rire par l'inattendu
burlesque de la contradiction qu'elle propose a l'esprit.
Si nous avons reussi a presenter une idee juste de ce que nous entendons
par fantaisie, on doit comprendre combien les oeuvres dramatiques qui
sont des creations de la fantaisie, telles que _la Cagnotte, le Chapeau
de paille d'Italie, la Grande-Duchesse, la Cigale_, etc., s'eloignent a
chaque instant de la realite des actes et des contingences possibles
de la vie. Les comediens qui traduisent sur la scene ces combinaisons
originales et fantaisistes doivent s'y sentir degages du monde reel,
sans quoi ils se trouveraient aussi mal a l'aise sur la scene que nous
pourrions nous trouver genes de nous voir en habit d'Arlequin dans la
compagnie de gens graves et serieux. La mise en scene ne doit avoir
qu'un but, c'est de fournir un fond suffisant sur lequel se detachent
en pleine lumiere ces creations de la fantaisie. Elle doit donc etre
sommaire et pourvoir uniquement aux necessites sceniques. Les costumes
surtout demandent une appropriation heureuse, aussi eloignee de la
correction que de l'excentricite banale. Il y faut conserver un certain
rapport avec la verite. Aussi ce sont les artistes les mieux doues sous
le rapport de l'observation qui trouvent les costumes les plus comiques;
car, en deformant la realite, ils ne la perdent cependant pas de vue et
font saillir aux yeux des s
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