laude s'etait arrete, petrifie. Fausta tendit les bras et dit avec une
funebre simplicite:
--Qu'attendez-vous?...
Claude eut un recul de bete sauvage a l'instant de regorgement. Fausta,
de sa meme voix affreusement simple, repeta:
--Qu'attendez-vous?
Alors Claude repoussa derriere lui Violetta comme pour une protection
supreme. Puis il joignit ses mains enormes et, la tete perdue, balbutia
d'une voix tres basse:
--Madame, c'est mon enfant... Je l'avais perdue... et je la retrouve
ici... Vous ne voudriez pas, n'est-ce pas? maintenant que vous savez.
Allons... laissez-nous passer...
--Bourreau, dit Fausta, qu'attends-tu pour executer la condamnee?
A ce mot de bourreau, un cri d'angoisse et d'horreur jaillit de la gorge
de Violetta.
--Mon pere!... Bourreau!... Mon pere est bourreau!...
Claude entendit ce cri. Alors, il se tourna vers la jeune fille. Une
sublime expression de desespoir s'etendit sur sa physionomie. Et d'un
accent indiciblement navre:
--Ne t'effraie pas... je ne te toucherai plus, si tu veux... je ne te
parlerai plus... je ne t'appellerai plus ma fille... mais ne t'effraie
pas. Je t'en supplie, n'aie pas peur... Madame, gronda-t-il soudain en
se retournant vers Fausta, vous venez de commettre un crime; vous avez
brise le lien d'affection qui rattachait cette enfant a l'infortune que
je suis. Et je vous le declare: prenez garde, maintenant...
--Prends garde toi-meme, bourreau! interrompit Fausta sans colere, Es-tu
en rebellion? Obeis-tu?
--Obeir! Ah ca! Je vous dis que c'est ma fille!... Ne crains rien, ma
petite Violetta. Sortons d'ici!
--Bourreau! dit Fausta d'une voix eclatante, choisis: de mourir avec
elle, ou d'obeir!...
--Obeir, moi! hurla Claude d'un accent sauvage. Assassiner ma fille,
moi!... Vous etes folle, ma Souveraine! Place! place, par l'enfer! Ou ta
derniere heure est venue!..
De son bras gauche, il entoura la taille de Violetta qu'il emporta...
Et, levant son bras, balancant dans l'espace son poing formidable, il
marcha sur Fausta...
Fausta vit venir sur elle l'homme, effroyable. Elle ne recula pas, mais
d'un sifflet qu'elle portait a la ceinture elle tira un son bref et
aigu... A l'instant meme, quinze gardes armes d'arquebuses firent
irruption dans la funebre salle.
Claude, portant Violetta a demi evanouie dans ses bras, recula en
grondant:
--Venez-y donc! Touchez-la, si vous osez...
Mais les gardes n'avancaient pas: sans doute, Fausta leur avait
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