dit:
-- Raoul, je ne crois rien de ce que l'on dit; je ne crois rien de
ce que vous craignez, non pas que des personnes dignes de foi ne
m'aient pas deja entretenu de cette aventure, mais parce que, dans
mon ame et dans ma conscience, je crois impossible que le roi ait
outrage un gentilhomme. Je garantis donc le roi, et vais vous
rapporter la preuve de ce que je dis.
Raoul, flottant comme un homme ivre entre ce qu'il avait vu de ses
propres yeux et cette imperturbable foi qu'il avait dans un homme
qui n'avait jamais menti, s'inclina et se contenta de repondre:
-- Allez donc, monsieur le comte; j'attendrai.
Et il s'assit, la tete cachee dans ses deux mains. Athos s'habilla
et partit. Chez le roi, il fit ce que nous venons de raconter a
nos lecteurs, qui l'ont vu entrer chez Sa Majeste et qui l'ont vu
en sortir.
Quand il rentra chez lui, Raoul, pale et morne n'avait pas quitte
sa position desesperee. Cependant au bruit des portes qui
s'ouvraient, au bruit des pas de son pere qui s'approchait de lui,
le jeune homme releva la tete.
Athos etait pale, decouvert, grave; il remit son manteau et son
chapeau au laquais, le congedia du geste et s'assit pres de Raoul.
-- Eh bien! monsieur, demanda le jeune homme en hochant tristement
la tete de haut en bas, etes-vous bien convaincu, a present?
-- Je le suis, Raoul; le roi aime Mlle de La Valliere.
-- Ainsi, il avoue? s'ecria Raoul.
-- Absolument, dit Athos.
-- Et elle?
-- Je ne l'ai pas vue.
-- Non; mais le roi vous en a parle. Que dit-il d'elle?
-- Il dit qu'elle l'aime.
-- Oh! vous voyez! vous voyez, monsieur!
Et le jeune homme fit un geste de desespoir.
-- Raoul, reprit le comte, j'ai dit au roi, croyez-le bien, tout
ce que vous eussiez pu lui dire vous-meme, et je crois le lui
avoir dit en termes convenables, mais fermes.
-- Et que lui avez-vous dit, monsieur?
-- J'ai dit, Raoul, que tout etait fini entre lui et nous, que
vous ne seriez plus rien pour son service; j'ai dit que, moi-meme,
je demeurerais a l'ecart. Il ne me reste plus qu'a savoir une
chose.
-- Laquelle, monsieur?
-- Si vous avez pris votre parti.
-- Mon parti? A quel sujet?
-- Touchant l'amour et...
-- Achevez, monsieur.
-- Et touchant la vengeance; car j'ai peur que vous ne songiez a
vous venger.
-- Oh! monsieur, l'amour... peut-etre un jour, plus tard,
reussirai-je a l'arracher de mon coeur. J'y compte, avec l'aide de
Dieu et le secours de vos sage
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