t par le naif, le serieux, le
profondement observe, jusqu'a la fantaisie du rire dans toute sa pompe
et au gai sabbat le plus delirant.
_Les Fourberies de Scapin_, jouees entre _le Bourgeois Gentilhomme_ et
_l'Ecole des Femmes_, appartiennent-elles a cette adorable folie comique
dont j'ai tache de donner idee, ou retombent-elles par moments dans la
farce un peu enfarinee et bouffonne, comme l'a pense Boileau en son _Art
poetique_? Je serais peut-etre de ce dernier avis, sauf les conclusions
trop generales qu'en tire le poete regulateur:
Etudiez la cour et connoissez la ville;
L'une et l'autre est toujours en modeles fertile.
C'est par la que Moliere, illustrant ses ecrits,
Peut-etre de son art eut remporte le prix,
Si, moins ami du peuple en ses doctes peintures,
Il n'eut pas fait souvent grimacer ses figures,
Quitte pour le bouffon l'agreable et le fin,
Et sans honte a Terence allie Tabarin:
Dans ce sac ridicule ou _Scapin l'enveloppe_,
Je ne reconnois plus l'auteur du _Misanthrope_.
Quant aux restrictions reprochees et reprochables a Boileau en cet
endroit, son tort est d'avoir trop generalise un jugement qui, applique
a _Scapin_, pourrait sembler vrai au pied de la lettre. Cette piece est
effectivement imitee en partie du _Phormion de Terence_, et en partie de
la _Francisquine_ de Tabarin. De plus, en lisant convenablement le vers:
Dans ce sac ridicule ou Scapin l'enveloppe [9]
(car Moliere en cette piece jouait le role de Geronte, et par consequent
il entrait en personne dans le sac), on concoit l'impression penible que
causait a Boileau cette vue de l'auteur du Misanthrope, malade, age de
pres de cinquante ans et batonne sur le theatre. Si nous eussions vu
notre Talma a la scene dans la meme situation subalterne, nous en
aurions certes souffert. Je lis dans Cizeron-Rival le trait suivant, qui
eclaire et precise le passage de l'Art poetique: "Deux mois avant la
mort de Moliere, M. Despreaux alla le voir et le trouva fort incommode
de sa toux et faisant des efforts de poitrine qui sembloient le menacer
d'une fin prochaine. Moliere, assez froid naturellement, fit plus
d'amitie que jamais a M. Despreaux. Cela l'engagea a lui dire: Mon
pauvre monsieur Moliere, vous voila dans un pitoyable etat. La
contention continuelle de votre esprit, l'agitation continuelle de vos
poumons sur votre theatre, tout enfin devroit vous determiner a renoncer
a la representation. N'y a-t-il que vous dans la
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