it et que le developpement de la vie urbaine invite
a grandir, par le _Jardin du roi_ qui sort de son obscurite, par
l'Academie des sciences fondee en 1666, par Bernier, Tournefort,
Plumier, Feuillee, Fagon, Delance, Duvernay, les sciences physiques et
naturelles deviennent la preoccupation des esprits. Elles profitent,
pour devenir populaires, de la decadence des lettres et de la
philosophie, de cette sorte de vide intellectuel qui n'est que trop
apparent de 1700 a 1720 environ; elles deviennent meme a la mode, et les
femmes savantes ont partout remplace les precieuses, et les presidents
a mortier en leurs academies de province ne dedaignent point de
"considerer des moucherons" et de dissequer des grenouilles. Elles ont
cause gagnee en 1725 et ont deja donne son pli a l'esprit du siecle.
Comme il arrive toujours a l'intelligence humaine, trop faible pour voir
a la fois plus d'un cote des choses, la science nouvelle parait toute la
science, semble apporter avec elle le secret de l'univers, et relegue
dans l'ombre les explications theologiques, ou metaphysiques ou
psychologiques qui en avaient ete donnees. Tout sera explique desormais
par les "lois de la nature", le surnaturel n'existera plus, _l'humain_
meme disparaitra; plus de metaphysique, plus de religion; et jusqu'a la
morale, qui n'est pas dans la nature, n'etant que dans l'homme, finira
elle-meme par etre consideree comme le dernier des "prejuges".
Ajoutez a cela des causes historiques dont la principale est la funeste
et a jamais detestable revocation de l'Edit de Nantes. Encore que le
protestantisme n'ait nullement ete, en ses commencements et en son
principe, une doctrine de libre examen, une religion individuelle,
insensiblement et indefiniment ployable jusqu'a se transformer par
degres en pur rationalisme, encore est-il qu'il etait dans sa destinee
de devenir tel. Il a ete, chez les peuples qui l'ont adopte, un passage,
une transition lente d'une religion a un etat religieux, et d'un etat
religieux a une simple disposition spiritualiste. Ce passage progressif
et lent eut pu avoir lieu en France comme ailleurs, sans la proscription
des protestants sous Louis XIV. La Revocation a eu, comme toute mesure
intransigeante, des consequences radicales; elle a supprime les
transitions, et jete brusquement dans le "libertinage" tous ceux qui
auraient simplement incline vers une forme de l'esprit religieux plus a
leur gre. Ce n'est pas en vain qu'on declare qu'on prefer
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