ressee?
Toutefois, et c'est la le point qu'il convient d'examiner, comment
l'Autriche-Hongrie a-t-elle concu la creation de l'Albanie, et cette
conception n'est-elle pas a l'origine de toutes les difficultes de
l'heure presente?
L'observateur equitable doit reconnaitre la tres difficile situation de
l'Autriche-Hongrie en presence de la liquidation balkanique. Quand, sans
s'en douter, elle l'a amorcee par l'annexion de la Bosnie, dont la
conquete de la Tripolitaine a ete la suite, elle etait loin de penser
que l'operation se poursuivrait comme on l'a vu. Sa diplomatie a ete
prise deux fois au depourvu, la premiere en escomptant la victoire
turque, la seconde en escomptant la victoire bulgare. Chaque fois elle a
manque d'energie avant et de doigte apres.
L'Autriche, en effet, pour qui veut se mettre un instant a la place de
ses dirigeants, a dans les Balkans trois interets essentiels a
sauvegarder, qu'on peut ainsi formuler: en premier lieu, liberte de la
mer Adriatique, pour n'y etre pas enfermee, et par suite garantie que
Vallona ne tombera pas au pouvoir d'une puissance grande ou petite; en
second lieu, maintien des debouches economiques qui ont une importance
capitale et traditionnelle pour le commerce de la monarchie
habsbourgeoise; en troisieme lieu, maintien de l'equilibre des forces en
Orient, pour n'etre pas prise dans un etau entre une union balkanique
presumee et la Russie.
A la veille de la premiere guerre, si l'Autriche avait prevu les deux
solutions possibles, au lieu de ne songer qu'a une, il y a lieu de
croire qu'elle aurait obtenu facilement satisfaction; un homme d'Etat,
comme le comte d'AErenthal, aurait pris ses precautions, en faisant
savoir a l'avance a la Grece qu'il considerait comme intangible Vallona
et toute sa region, a la Serbie que, si celle-ci pouvait s'emparer de la
Vieille-Serbie, l'Autriche reoccuperait le sandjak et elle demanderait
la promesse d'une liaison ferree directe de la Bosnie a Uskub ainsi que
des avantages economiques. Ces demandes, presentees avec energie et
habilete avant la guerre, auraient sans doute ete accueillies avec
empressement par la Serbie, au prix d'une neutralite bienveillante.
Quant a l'equilibre des forces en Orient, il etait aise de l'assurer:
Grece et Roumanie avaient trop d'interet a se mefier d'une preponderance
slave.
Au lieu de suivre une telle ligne de conduite, prudente, profitable et
energique, l'Autriche, ballottee par les circonstances, n'
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