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perches sur leurs balcons et regardant en bas vers le peuple, les uns
avec effroi, les autres avec esperance, et tous se disant: "Que fait-il?
que va-t-il faire? que pense-t-il? que veut-il? quel mal ou quel bien va
sortir de lui? Questions insolubles!" Le peuple n'en sait pas davantage
sur ceux qu'il regarde d'en bas, il n'en sait guere plus sur lui-meme.
Il attend et il s'inspirera du moment; et qu'importe ce qu'il fera, s'il
ne sait pas pourquoi il le fait?
Instruisons-le sous toutes les formes. Le resultat de nos efforts est
peut-etre fort eloigne, mais au moins il est sur, et tout le reste est
inutile.
Je n'ai pas le temps de vous en dire davantage. Je vous ecrirai de
Nohant, et, en attendant, j'envoie a votre digne compagne, a votre
famille et a tous vos chers enfants mille tendres souvenirs.
G. SAND.
DXV
A M. ARMAND BARBES, A LA HAYE
Nohant, 3 mai 1862.
Mon ami bien cher,
Je suis, depuis longtemps deja, sans nouvelles de vous. Pouvez-vous
m'en faire donner, si le travail d'ecrire vous fatigue encore?
Dois-je esperer que vous etes mieux, comme, votre derniere lettre me
l'annoncait?
Moi, je veux vous annoncer le prochain mariage de mon fils avec la fille
de mon vieux et cher ami Calamatta. C'est une charmante enfant et un
esprit genereux. Cette union est un voeu de mon coeur enfin accompli.
Vous partagerez ma joie, vous qui ne vivez que pour vos amis sans songer
a vous-meme. Mais, s'il est possible, parlez-moi un peu de vous, sinon
pensez a moi et souhaitez du bonheur a mon cher fils. Le ciel, qui vous
aime, y aura egard!
GEORGE SAND.
DXVI
A SON ALTESSE LE PRINCE NAPOLEON (JEROME), A PARIS
Nohant, 11 mai 1862.
Cher prince,
Etes-vous encore a Paris? Je me hate de vous remercier de toute mon ame
pour ma soeur, qui va, grace a vous, se trouver heureuse.
A present, j'ai le coeur tout a fait libre de cette perplexite de
famille et je suis toute au bonheur de mes enfants, qui se marient dans
quelques jours. Ah! si vous ne partiez pas cette semaine, ce serait
si vite fait pour vous de venir, _incognito_, passer vingt-quatre
heures!--_Ma!_--peut-etre seriez-vous un peu compromis par notre liberte
de conscience?--pas de pretre!
Nous sommes excommunies, comme tous ceux qui, de fait ou d'intention,
ont souhaite l'unite de l'Italie et le triomphe de Victor-Emmanuel;
nous nous tenons pour chasses de l'Egl
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