etracte ses
eloges, et declare n'avoir plus aucune opinion a cet egard.
Robespierre prenant encore une fois la parole sur Camille, repete ce qu'il
avait deja dit a son egard: que son caractere est excellent, mais que ce
caractere connu ne lui donne pas le droit d'ecrire contre les patriotes;
que ses ecrits, devores par les aristocrates, font leurs delices, et sont
repandus dans tous les departemens; qu'il a traduit Tacite sans l'entendre;
qu'il faut le traiter comme un enfant etourdi qui a touche a des armes
dangereuses et en a fait un usage funeste, l'engager a quitter les
aristocrates et les mauvaises societes qui le corrompent; et qu'en lui
pardonnant a lui, il faut bruler ses numeros. Camille, alors, oubliant les
menagemens qu'il fallait garder envers l'orgueilleux Robespierre, s'ecrie
de sa place: "Bruler n'est pas repondre.--Eh bien! reprend Robespierre
irrite, qu'on ne brule pas, mais qu'on reponde; qu'on lise sur-le-champ les
numeros de Camille. Puisqu'il le veut, qu'il soit couvert d'ignominie; que
la societe ne retienne pas son indignation, puisqu'il s'obstine a soutenir
ses diatribes et ses principes dangereux. L'homme qui tient aussi fortement
a des ecrits perfides est peut-etre plus qu'egare; s'il eut ete de bonne
foi, s'il eut ecrit dans la simplicite de son coeur, il n'aurait pas ose
soutenir plus long-temps des ouvrages proscrits par les patriotes et
recherches par les contre-revolutionnaires. Son courage n'est qu'emprunte;
il decele les hommes caches sous la dictee desquels il a ecrit son journal;
il decele que Desmoulins est l'organe d'une faction scelerate qui a
emprunte sa plume pour distiller son poison avec plus d'audace et de
surete." Camille veut en vain demander la parole et calmer Robespierre; on
refuse de l'ecouter, et on passe sur-le-champ a la lecture de ses feuilles.
Quelque menagement que les individus veuillent garder les uns pour les
autres dans des querelles de parti, il est difficile que bientot les
amours-propres ne se trouvent pas engages. Avec la susceptibilite de
Robespierre et la naive etourderie de Camille, la division d'opinions
devait bientot se changer en une division d'amour-propre et en haine.
Robespierre meprisait trop Hebert et les siens pour se brouiller avec eux;
mais il pouvait se brouiller avec un ecrivain aussi celebre dans la
revolution que Camille Desmoulins, et celui-ci ne mit pas assez d'adresse a
eviter une rupture.
La lecture des numeros de Camille occupe deux
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