rgees, il lui donnerait une escadre, le materiel d'une
armee, et les emigres enregimentes, mais point de soldats anglais; et
que si, comme on l'ecrivait de Bretagne, les dispositions des royalistes
n'etaient pas changees, et si l'expedition reussissait, il tacherait de
la rendre decisive, en y envoyant une armee. Il resolut ensuite de
porter sa marine de quatre-vingt mille marins a cent mille. Il imagina
pour cela une espece de conscription. Chaque vaisseau marchand etait
tenu de fournir un matelot par sept hommes d'equipage: c'etait une dette
que le commerce devait acquitter pour la protection qu'il recevait de la
marine militaire. L'agriculture et l'industrie manufacturiere devaient
egalement des secours a la marine, qui leur assurait des debouches; en
consequence chaque paroisse etait obligee de fournir aussi un matelot.
Pitt s'assura ainsi le moyen de donner a la marine anglaise un
developpement extraordinaire. Les vaisseaux anglais etaient tres
inferieurs pour la construction aux vaisseaux francais; mais l'immense
superiorite du nombre, l'excellence des equipages, et l'habilete des
officiers de mer, ne rendaient pas la rivalite possible.
Avec tous ces moyens reunis, Pitt se presenta au parlement. L'opposition
etait augmentee cette annee de vingt membres a peu pres. Les partisans
de la paix et de la revolution francaise etaient plus animes que jamais,
et ils avaient des faits puissans a opposer au ministre. Le langage que
Pitt preta a la couronne, et qu'il tint lui-meme pendant cette session,
l'une des plus memorables du parlement anglais par l'importance des
questions et par l'eloquence de Fox et de Sheridan, fut infiniment
adroit. Il convint que la France avait obtenu des triomphes inouis; mais
ces triomphes, loin de decourager ses ennemis, disait-il, devaient au
contraire leur donner plus d'opiniatrete et de constance. C'etait
toujours a l'Angleterre que la France en voulait; c'etait sa
constitution, sa prosperite qu'elle cherchait a detruire; il etait a la
fois peu prudent et peu honorable de ceder devant une haine aussi
redoutable. Dans le moment surtout, deposer les armes serait, disait-il,
une faiblesse desastreuse. La France, n'ayant plus que l'Autriche et
l'Empire a combattre, les accablerait; fidele alors a sa haine, elle
reviendrait, libre de ses ennemis du continent, se jeter sur
l'Angleterre, qui seule desormais dans cette lutte aurait a soutenir un
choc terrible. On devait donc profiter du moment ou pl
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