essaie de
presenter quelques reflexions, on l'accable de huees; il parle de ses
services, de ses dangers, des deux coups de feu de Ladmiral: on le raille,
on l'injurie, on le chasse de la tribune. Tous les deputes presens et
designes par Couthon sont chasses; quelques-uns meme sont battus. Collot se
sauve au milieu des couteaux diriges contre lui. La societe se trouvait
augmentee ce jour-la de tous les gens d'action qui, dans les momens[1] de
trouble, penetraient sans avoir de cartes ou avec une carte fausse. Ils
joignaient aux paroles la violence; et ils etaient meme tout prets a y
ajouter l'assassinat. L'agent national Payan, qui etait homme d'execution,
proposait un projet hardi. Il voulait que l'on allat sur-le-champ enlever
tous les conspirateurs, et on le pouvait, car ils etaient en ce moment meme
reunis ensemble dans les comites dont ils etaient membres. On aurait ainsi
termine la lutte sans combat et par un coup de main. Robespierre s'y
opposa; il n'aimait pas les actions si promptes; il pensait qu'il fallait
suivre tous les procedes du 31 mai. On avait deja fait une petition
solennelle; il avait fait un discours; Saint-Just, qui venait d'arriver de
l'armee, ferait un rapport le lendemain matin; lui Robespierre parlerait de
nouveau, et, si on ne reussissait pas, les magistrats du peuple, reunis
pendant ce temps a la commune, et appuyes par la force armee des sections,
declareraient que le peuple etait rentre dans sa souverainete, et
viendraient delivrer la convention des scelerats qui l'egaraient. Le plan
se trouvait ainsi trace par les precedens. On se separa en se promettant
pour le lendemain, Robespierre d'etre a la convention, les jacobins dans
leur salle, les magistrats municipaux a la commune, et Henriot a la tete
des sections. On comptait de plus sur les jeunes gens de l'ecole de Mars,
dont le commandant, Labreteche, etait devoue a la cause de la commune.
Telle fut cette journee du 8 thermidor, la derniere de la tyrannie
sanglante qui s'etait appesantie sur la France. Cependant, ce jour encore,
l'horrible machine revolutionnaire ne cessa pas d'agir. Le tribunal siegea,
des victimes furent conduites a l'echafaud. Dans le nombre etaient deux
poetes celebres, Roucher, l'auteur des _Mois_, et le jeune Andre Chenier,
qui laissa d'admirables ebauches, et que la France regrettera autant que
tous ces jeunes hommes de genie, orateurs, ecrivains, generaux, devores par
l'echafaud et par la guerre. Ces deux enfans des
|