tatonnait pour son propre
compte. Ce n'est que beaucoup plus tard que l'ecole, s'etant formee,
attribua au chef un systeme absolu qui n'avait ete d'abord qu'une
preference de gout.
A plus forte raison peut-on le dire des dynasties qui se sont succede
depuis Balzac, et dont les chefs principaux n'ont fait que rediger dans
des programmes les qualites dominantes de leur esprit, soit Flaubert,
l'homme d'un chef-d'oeuvre unique et d'un immense labeur, soit les
freres Goncourt, deux artistes de la sensation subtile et aigue, soit
Alphonse Daudet, dont l'observation profonde et cruelle a eu de si
fortes prises sur les esprits de son temps, ou bien encore Zola, qui a
cree l'epopee du roman ultra-democratique, le maitre de l'_Assommoir_
et de _Germinal_, jusqu'a l'avenement nouveau de Paul Bourget et de Guy
de Maupassant, l'un psychologue raffine et souffrant "du mal de la vie",
l'autre doue d'un humour naturel et d'un style de race qui dissimulent
mal un fond effrayant de mepris pour l'homme, peut-etre meme, si l'on
penetre plus loin, une tristesse presque tragique. En realite, peut-on
dire que chacun de ces noms represente une ecole? Assurement non; ce
qu'il faut y voir, ce sont des diversites d'esprits a l'infini, dont
chacun s'attribue l'initiative et la souverainete d'un genre nouveau; il
y a des variations de genres d'un esprit a un autre, comme, a certains
moments, il y a des variations du gout dans l'esprit public. Les modes
n'ont qu'un temps; elles se succedent les unes aux autres sans se
detruire et meme sans se remplacer, par une sorte de rythme regulier.
Nul ne peut dire de quel cote ira la generation prochaine, quand on sera
fatigue des exces de l'observation brutale. Ce sera peut-etre l'occasion
de revenir a George Sand, trop delaissee un instant par une epoque
exclusivement positive, amoureuse des faits plus que des idees, eprise
de methodes experimentales la meme ou elles n'ont que faire, et defiante
des belles chimeres. Et deja paraissent chez des esprits en eveil des
symptomes d'une reaction vers la creatrice de tant de beaux romans.
George Sand etait portee, par son temperament d'esprit, a la conception
d'aventures plus ou moins chimeriques, au conflit des passions ideales
avec des evenements imaginaires; elle s'y complaisait delicieusement.
Mais on se tromperait fort en croyant qu'elle observat mediocrement la
vie reelle et qu'elle ne s'en inspirat que rarement. Que de preuves nous
pourrions donner du con
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