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le oeuvre qui mene grand bruit, il la laisse, il la reprend a sa fantaisie. Le roman semble s'adapter de lui-meme a ces intervalles inoccupes de la vie moderne; il remplit les repos de l'action ou des affaires, ou l'homme, meme le plus ordinaire, sent en lui je ne sais quelle vague lassitude ou quelle morne inquietude qui ressemble a un besoin de penser. Mais l'influence du roman ne s'arrete pas la; il n'est pas uniquement l'entretien et la distraction intellectuelle d'un grand nombre d'esprits vides ou mediocrement cultives. Les intelligences les plus hautes elles-memes n'y echappent pas; c'est une sorte d'habitude qui s'est creee pour l'esprit. Je demandais a un philosophe distingue de ce temps quel etait, d'ordinaire, le premier article qu'il lisait dans la _Revue des Deux Mondes_. Il me repondit avec ingenuite que c'etait toujours par le roman qu'il commencait sa lecture. Le plus grave esprit de notre age, celui qu'on se figurait, surtout dans les dernieres annees de sa vie, comme naturellement absorbe dans les plus hautes meditations philosophiques ou religieuses, M. Guizot, me disait qu'il travaillait dans la premiere partie de la journee, qu'il faisait une promenade selon le temps, et que, tous les jours de sa vie, il rentrait a quatre heures pour se faire lire un roman anglais. Mais c'est surtout dans la vie des jeunes gens et des femmes que le roman s'est introduit, impose comme l'aliment principal de leur intelligence. On peut dire que, pour beaucoup, il est devenu la litterature unique. C'est ici que se place naturellement un voeu, une esperance, si l'on aime mieux, en faveur de la renaissance de George Sand, comme un des maitres injustement oublies. Si l'on reve pour le roman d'etre autre chose que la distraction abaissee d'une intelligence en detresse, l'element d'une curiosite vulgaire, s'il doit, comme les autres formes de l'art, racheter sa souverainete par une fin elevee, la justifier, avoir un but, en un mot, ne serait-ce pas a la condition qu'il mit un peu d'ideal dans cette pauvre vie, si agitee en apparence, si surexcitee au dehors, bruyante a la surface, au dedans si terne et si morne? Ne serait-ce pas aller contre ce but que de proscrire cet ideal de la vie factice qui se joue devant notre imagination, comme on le proscrit avec tant de soin de la vie reelle? Et quel art est-ce donc, si c'en est un, de nous donner dans une succession de types avilis, de situations tour a tour ternes et violentes
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