blancheur des marbres?" Au bout de peu de jours il fut rassasie de
statues, de fresques, d'eglises et de galeries. Son plus doux souvenir
fut celui d'une eau limpide et froide ou il lava son front chaud et
fatigue dans un jardin de Genes. "C'est que les creations de l'art
parlent a l'esprit seul, et que le spectacle de la nature parle a
toutes les facultes. Il nous penetre par tous les pores comme par toutes
les idees. Au sentiment tout intellectuel de l'admiration l'aspect des
campagnes ajoute le plaisir sensuel. La fraicheur des eaux, les parfums
des plantes, les harmonies du vent circulent dans le sang et les nerfs,
en meme temps que l'eclat des couleurs et la beaute des formes
s'insinuent dans l'imagination."
La nature tout entiere passe dans l'homme; elle lui parle le langage le
plus varie. Il y a quelques pages, a la fin du premier volume de _la
Daniella_, qui sont une tentative etonnante pour exprimer l'effet
d'orchestre que realisent pour des oreilles intelligentes ces jeux
sonores et combines de la campagne. Jean Valreg est monte, le soir, sur
la petite terrasse du chateau de Mondragon, et la il recueille tous les
bruits des collines et des vallees qui montent jusqu'a lui, il etudie
cette musique produite par la rencontre des sons epars qui constitue en
ce pays la musique naturelle, locale. "Il y a, dit-il, des endroits
comme cela qui chantent toujours", et celui-ci est le plus melodieux ou
il se soit jamais trouve. Et il enumere, dans une langue bien curieuse,
tous ces bruits divers: la chanson des grandes girouettes, si
regulierement phrasee a son debut qu'il a pu ecrire six mesures
parfaitement musicales, lesquelles reviennent invariablement a chaque
souffle du vent d'est. Ces girouettes pleurardes et radoteuses, avec
leurs notes d'une tenuite impossible, sont comme les tenors aigus qui
dominent l'ensemble. "Je ne sais quel esprit de l'air les met d'accord
avec le son des cloches des Camaldules.... D'autres chants se melent a
ces bruits: ce sont les refrains des paysans epars dans la campagne....
Les basses continues sont dans le bruissement lourd des pins demesures
et d'une cascade qui recueille les eaux perdues des ruines. Puis il y a
les cris des oiseaux, des vautours, et des aigles surtout." En ecoutant
tout cela, Valreg poursuit une idee qui l'a bien souvent frappe dans ces
harmonies naturelles que produit le hasard; par cela meme qu'elles
echappent aux regles tracees, elles atteignent a des effets d'
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