qui...!
Je me mis a balbutier d'une maniere extravagante.
--Laissez, laissez, reprit-elle. Ne vous defendez pas de vos
preventions, je les connais. Elles ont perce trop brutalement, lorsqu'a
propos de ma theorie tout impersonnelle sur les diamants, vous avez dit
que c'etait un gout de courtisane!
--Mais, au nom du ciel, laissez-moi jurer que je n'ai pas dit cela!
--Vous l'avez pense, et vous avez dit l'equivalent. Ecoutez, je viens de
recevoir ici, de la part de ce juif et par contre-coup de la votre, une
mortelle insulte. Ne croyez pas que le dedain qui me preserve de la
colere me garantisse d'une reelle et profonde douleur...
Je vis, aux rayons de la lune, un ruisseau de larmes briller comme un
flot de perles sur les joues pales de cette charmante femme, et, sans
savoir ce que faisais, encore moins ce que je disais, je tombai a ses
pieds en lui jurant que je la respectais, que je la plaignais, et que
j'etais pret a la venger. Peut-etre en ce moment m'arriva-t-il de lui
dire que je l'aimais. Troubles tous deux, moi de sa douleur, elle de ma
subite emotion, nous fumes quelques instants sans nous entendre l'un
l'autre et sans nous entendre nous-memes.
Elle surmonta ce trouble la premiere, et, repondant a une parole que je
lui repetais pour attenuer ma faute:
--Oui, je le sais, dit-elle, vous etes un enfant; mais, s'il n'y a rien
de genereux comme un enfant qui croit, il n'y a rien de terrible et de
cruel comme un enfant qui doute, et vous etes l'ami, l'_alter ego_ d'un
autre enfant bien plus sceptique et bien plus brutal que vous... Mais je
ne veux me brouiller ni avec l'un ni avec l'autre. Il faut que l'aimable
et douce Paule de Valvedre soit heureuse. Vous etes deja son ami,
puisque vous etes celui de son fiance; ou j'aurais tort contre vous
trois, ou, en me donnant raison contre vous deux, Paule souffrirait.
Permettez donc que je m'explique avec vous, et que je vous dise un peu
qui je suis. Ce sera dit en deux mots. Je suis une personne _accablee,
finie_, inoffensive par consequent. Henri Obernay m'a presentee a vous,
je le sais, comme une plaintive et ennuyeuse creature, mecontente de
tout et accusant tout le monde. C'est sa these, il l'a soutenue devant
moi; car, s'il est mal eleve, il est sincere, et je sais bien que je
n'ai pas en lui un ennemi perfide. Dites-lui que je ne me plains de
personne, et, ceci etabli, fuites-lui part du motif qui m'amenait ici,
vous qui savez et devez taire celui qui va de
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