avait beaucoup pleure pour se separer de son frere et de sa
marraine, si bien que madame, qui ne pouvait pas voir pleurer _ces
messieurs_, avait decide qu'ils partiraient ensemble, et qu'elle
resterait a Valvedre jusqu'a la fin du mois. Toute la famille etait donc
partie le 7, et l'on s'etonnait beaucoup dans la maison de l'idee que
madame avait eue de rester trois semaines toute seule a Valvedre, ou
l'on savait bien qu'elle s'ennuyait, meme quand elle y avait de la
compagnie.
Tous ces details etaient arrives a mon hotesse par un jardinier du
chateau qui etait son neveu.
J'aurais volontiers tente une promenade nocturne autour de ce chateau
enchante, et rien n'eut ete plus facile que de sortir de ma retraite
sans etre observe; car, a dix heures, le vieux couple ronflait comme
s'il eut voulu faire concurrence au tonnerre; mais la tempete sevissait
avec rage, et je dus attendre le lendemain.
Le soleil se leva splendide. Je pris avec affectation mon album de
voyage, et je partis pour une promenade assez fantastique. Je fis cinq
ou six fois le tour de la residence, en retrecissant toujours le cercle,
de maniere a connaitre comme a vol d'oiseau tous les details de la
localite. Chemins, fosses, prairies, habitations, ruisseaux et rochers,
tout me fut aussi familier au bout de quelques heures que si j'etais ne
dans le pays. Je connus les endroits decouverts et les endroits habites
ou je ne devais pas repasser pour ne point attirer l'attention, les
sites dont d'autres paysagistes s'etaient empares et ou je ne voulais
pas etre oblige de faire connaissance avec eux, les sentiers ombrages et
frayes seulement par les troupeaux au flanc des collines, ou j'etais a
peu pres sur de ne point rencontrer d'etres trop civilises. Enfin je
m'assurai d'une direction invraisemblable, mais admirablement
mysterieuse, pour circuler de mon gite a la villa, et qui offrait des
retraites sauvages ou je pouvais me derober aux regards mefiants ou
curieux, en m'enfoncant dans les bois jetes a pic le long des ravins.
Cette exploration faite, je me hasardai a penetrer dans le parc de
Valvedre par une breche que j'avais reussi a decouvrir. On etait en
train de la reparer, mais les ouvriers etaient absents. Je me glissai
sous la futaie, j'arrivai jusqu'a la lisiere d'un parterre richement
fleuri, et je vis en face de moi la maison blanche construite a
l'italienne, elevee sur un massif de maconnerie entoure de colonnes. Je
remarquai quatre fenetres a ri
|