sur
l'ordre d'Aramis, les emportant tous deux vers Fontainebleau avec
la rapidite des nuages qui couraient au ciel sous le dernier
souffle de la tempete, La Valliere etait chez elle, en simple
peignoir de mousseline, et achevant sa collation sur une petite
table de marbre.
Tout a coup sa porte s'ouvrit, et un valet de chambre la prevint
que M. Fouquet demandait la permission de lui rendre ses devoirs.
Elle fit repeter deux fois; la pauvre enfant ne connaissait
M. Fouquet que de nom, et ne savait pas deviner ce qu'elle pouvait
avoir de commun avec un surintendant des finances.
Cependant, comme il pouvait venir de la part du roi, et, d'apres
la conversation que nous avons rapportee, la chose etait bien
possible, elle jeta un coup d'oeil sur son miroir, allongea encore
les longues boucles de ses cheveux, et donna l'ordre qu'il fut
introduit.
La Valliere cependant ne pouvait s'empecher d'eprouver un certain
trouble. La visite du surintendant n'etait pas un evenement
vulgaire dans la vie d'une femme de la Cour. Fouquet, si celebre
par sa generosite, sa galanterie et sa delicatesse avec les
femmes, avait recu plus d'invitations qu'il n'avait demande
d'audiences.
Dans beaucoup de maisons, la presence du surintendant avait
signifie fortune. Dans bon nombre de coeurs, elle avait signifie
amour.
Fouquet entra respectueusement chez La Valliere, se presentant
avec cette grace qui etait le caractere distinctif des hommes
eminents de ce siecle, et qui aujourd'hui ne se comprend plus,
meme dans les portraits de l'epoque, ou le peintre a essaye de les
faire vivre.
La Valliere repondit au salut ceremonieux de Fouquet par une
reverence de pensionnaire, et lui indiqua un siege.
Mais Fouquet, s'inclinant:
-- Je ne m'assoirai pas, mademoiselle, dit-il, que vous ne m'ayez
pardonne.
-- Moi? demanda La Valliere.
-- Oui, vous.
-- Et pardonne quoi, mon Dieu?
Fouquet fixa son plus percant regard sur la jeune fille, et ne
crut voir sur son visage que le plus naif etonnement.
-- Je vois, mademoiselle, dit-il, que vous avez autant de
generosite que d'esprit, et je lis dans vos yeux le pardon que le
sollicitais. Mais il ne me suffit pas du pardon des levres, je
vous en previens, il me faut encore le pardon du coeur et de
l'esprit.
-- Sur ma parole, monsieur, dit La Valliere, je vous jure que je
ne vous comprends pas.
-- C'est encore une delicatesse qui me charme, repondit Fouquet,
et je vois que ne voulez po
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