'etaient
nulle part plus en vigueur que dans les endroits frequentes par les
negriers d'Europe, en ces memes lieux ou un commerce honorable et legitime
eut fait eclore une riche moisson de civilisation et de lumieres. Nous ne
croyons pas necessaire de faire observer que de si pitoyables argumens ne
pouvaient se rencontrer que dans la bouche de gens demoralises par
l'interet, ayant la conscience de leur crime, mais desirant presenter
quelques excuses specieuses pour pallier un peu les horreurs trop
manifestes qu'ils infligeaient a leurs semblables. Mais, ici, il est une
justice que nous devons rendre aux marchands d'esclaves. Les plus ardens
defenseurs de ce criminel commerce, avouerent franchement que s'il
n'existait pas deja, aucune vue de speculation ne pourrait les porter a le
commencer. Mais les capitaux des marchands d'esclaves etaient engages dans
ce commerce, et de meme que ces assassins Italiens qui, en quittant leur
metier homicide, cherchent un dedommagement pour leurs stilets, de meme
ils demandaient que, s'ils venaient a donner une autre direction a leur
industrie, on les indemnisat, non pour la valeur de leurs navires,
puisqu'ils pouvaient les employer a un autre genre de commerce, mais pour
la valeur de leurs armes a feu, de leurs fouets, de leur chaines et de
tout cet attirail de cruaute qui allait leur devenir inutile. On appuyait
aussi, mais faiblement, pour la continuation de la Traite, sur les pertes
qu'allaient supporter nos manufactures qui fournissaient les articles
d'exportation qu'on donnait en echange des malheureuses victimes. Les
abolitionnistes, de leur cote, accuserent avec raison les negriers d'avoir
empeche, par leur criminel trafic, les peuples du continent Africain, de
se livrer a un commerce mille fois plus profitable a l'Europe que ce
commerce de chair humaine qui desolait les rivages de la malheureuse
Afrique, et livrait ses enfans a des bourreaux etrangers.
"Pourquoi," s'ecriait Pitt, dans sa vertueuse indignation, "pourquoi
l'Afrique serait-elle condamnee a rester perpetuellement sous l'interdit?
Combien de pays jadis aussi barbares qu'elle, sont aujourd'hui le siege de
la civilisation et des lumieres, le champ de l'industrie et du commerce!"
Mais le plus important de nos auxiliaires, dans notre lutte contre les
marchands d'esclaves, ce fut la religion. A tort ou a raison, on a impute
a nos peres vivant dans un siecle d'ignorance sous l'empire de la foi
catholique, cette opinion i
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