ons. L'Angleterre s'efforce, a grands frais, de repandre les
arts et les bienfaits de la civilisation sur ces rivages africains
nagueres l'affreux theatre des crimes de la Traite; elle batit des
villages, eleve des ecoles et, d'une main liberale, jette sur cette terre
desolee les semences sociales; deja elle commence a voir recompenser ses
philanthropiques efforts, et deja les premices d'une moisson abondante
viennent rejouir ses regards. Quant a la France, elle s'occupe a deverser
la desolation sur les provinces que la paix lui a rendues sur la cote
d'Afrique; a son aspect, a l'aspect de ses coupables agens, la fertilite
et le bonheur s'enfuient devant l'anarchie et la devastation, et ces memes
rivages qui presentaient l'image d'un nouvel Eden, n'offrent plus aux
regards qu'un desert desole."
Se peut-il que l'ancienne noblesse de France, cette noblesse qui se dit le
boulevard du trone, supporte avec calme l'humiliante comparaison que ses
ennemis ne manqueront pas de faire entre la conduite d'un gouvernement
monarchique et celle tenue par des etats republicains? En effet, sans
parler de la Grande-Bretagne, partout ou la voix du peuple s'est fait
entendre aux Etats-Unis d'Amerique, a Buenos Ayres, dans la republique de
Colombia, au Chili, au sein des Cortes Espagnoles, partout cet injuste et
sanglant commerce a ete abjure avec indignation; tandis que la France,
rendue a l'antique race de ses rois, dans un temps ou sa politique doit
necessairement partager de la nature et du caractere d'une royaute legale
et constitutionnelle, la France voit ses sujets exercer, avec activite et
de notoriete publique, cette meme Traite que condamnent ses lois; de sorte
que le gouvernement Francais pourrait etre accuse de proteger ces
criminelles entreprises, comme profitables au commerce francais, et
encourir consequemment, quoique bien a tort nous aimons a le croire, un
reproche de connivence avec les fauteurs obstines de ce commerce horrible.
Vous etes sensibles, dites-vous, a tout ce qui interesse l'honneur de la
France, vous avez deplore le voile de honte dont les crimes de quelques
revolutionnaires ont couvert, pendant une epoque courte mais horrible, la
patrie ensanglantee; et vous oubliez que les atrocites de la Traite sont,
sans comparaison, beaucoup plus horribles dans leurs affreuses
circonstances et bien plus immensement funestes dans leurs effets, que les
plus abominables d'entre les crimes que vous deplorez.
Il faut du moi
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