uvaient dans un veritable Paradis
comparativement au pays qu'ils quittaient. Il y en eut meme qui allerent
jusqu'a soutenir que, dans plusieurs endroits de l'Afrique, les habitans
etaient anthropophages, preferant la chair de l'homme a toute autre
nourriture; qu'en cet etat de choses, non seulement les prisonniers de
guerre, mais meme tous les habitans beaux et gras seraient infailliblement
devores par leurs barbares concitoyens, si les charitables negriers ne les
arrachaient a la mort, en se chargeant de les transporter aux Indes
occidentales, et cela par pure humanite. Ce n'est pas sans raison qu'on a
souvent accuse de credulite le peuple Breton. Cependant, il n'eut pas la
faiblesse de preter foi a une accusation aussi denuee de toute espece de
fondement. Il vit combien etait meprisable et invraisemblable, tout
ensemble, une accusation de cette nature; attendu, surtout, que, pour la
justifier, les negriers et leurs avocats ne pouvaient produire, un seul
exemple parmi les Africains. D'ailleurs, cette accusation n'etait pas
nouvelle: elle ne s'etait pas bornee aux peuples de l'Afrique: on pourrait
a peine citer un seul peuple barbare contre lequel elle n'ait pas ete
dirigee, et toujours, apres un plus mur examen, on en a reconnu
l'injustice.
Les Anglais accoutumes, comme jures, a apprecier la valeur des accusations
et des temoignages, ne pouvaient admettre une accusation dirigee contre
les opprimes par les oppresseurs eux-memes, dans le dessein manifeste de
justifier leur crime. L'indignation publique fut le prix de cette
insolente pretention par laquelle les marchands d'esclaves se couvraient
hypocritement du manteau de l'humanite dans une question ou l'interet
etait, si evidemment, le seul mobile de leur infame conduite. Le cri
national fit justice de cet abus de tous les sentimens honorables et
vertueux. Le peuple Anglais comprit facilement que tolerer plus long-temps
la Traite, ce serait non seulement tolerer la violation de toutes les lois
divines et humaines, mais encore imprimer sur le caractere Britannique une
souillure ineffacable, et se presenter aux regards de la posterite et de
l'histoire, comme l'oppresseur et l'ennemi du genre humain.
Quant a l'argument tire des superstitions cruelles de quelques peuples
d'Afrique, nous vainquimes nos adversaires par leurs propres armes et
tournames contre eux leurs propres batteries. Nous prouvames que ces
superstitions, bien loin d'avoir ete affaiblies par la Traite, n
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