oup sur la meilleure histoire qui ait ete ecrite de la
Litterature Americaine. Puis il faudrait y ajouter en entier les
_Marginalia_, ou pensees detachees de Poe, dont l'excellente traduction
partielle qu'en a tentee M. Hennequin nous a donne un precieux
avant-gout.--Nous esperons, avec le temps, remplir cette tache
interessante.
Il serait superflu de faire ici l'eloge des Contes et Essais qui
composent ce volume. S'ils n'ont pas au meme degre les caracteres
d'interet et de pathetique poignant, les hautes qualites pittoresques
ou dramatiques de certains recits plus connus que l'on est convenu
d'appeler les chefs-d'oeuvre de Poe, ils se recommandent singulierement
pour la plupart, a notre avis, par une veine d'humour et de malice
incomparable, et par une originalite de composition et de forme d'autant
plus frappante que les sujets semblaient moins preter a l'inattendu et
a la fantaisie. Le fantastique et le grotesque y revetent un air de
gravite et de sang-froid qui est du plus haut comique, et donne a la
satire ou a la lecon morale un relief des plus saisissants.
A cote de ces qualites vraiment caracteristiques du procede litteraire
de Poe, on retrouvera dans quelques-uns de ces morceaux--le _Mellonta
tauta, le Mille et deuxieme Conte de Scheherazade_, par exemple,--les
profondes vues philosophiques, l'erudition etendue et surtout
l'enthousiasme eclaire pour les merveilleuses decouvertes de la science
moderne qui ont inspire l'admirable _Eureka_. En allant d'un essai
a l'autre, le lecteur sera emerveille de l'etonnante souplesse avec
laquelle l'auteur sait passer de l'examen des problemes les plus ardus
des sciences physiques ou morales a la critique legere des filous et des
Reviewers, ou a la charge epique d'un dandy francais ou d'un bas-bleu
americain.
A y regarder de pres, il y a plus de philosophie dans un conte de Poe
que dans les gros livres de nos metaphysiciens.
F. RABBE.
LE DUC DE L'OMELETTE
"_Il arriva enfin dans un climat plus frais._"
COWPER.
Keats est mort d'une critique. Qui donc mourut de l'_Andromaque_[1]?
Ames pusillanimes! De l'Omelette mourut d'un ortolan. _L'histoire en est
breve_[2]. Assiste-moi, Esprit d'Apicius!
Une cage d'or apporta le petit vagabond aile, indolent, languissant,
enamoure, du lointain Perou, sa demeure, a la Chaussee d'Antin. De
la part de sa royale maitresse la Bellissima, six Pairs de l'Empire
apporterent au duc de l'Omelette l'heureux oiseau.
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