resume, il faut vous lever et vous laisser etrangler."
Ces paroles, m'apprend l'Isitsooernot, affligerent et etonnerent a la
fois Scheherazade. Mais comme elle savait que le roi etait un homme
d'une integrite scrupuleuse et incapable de forfaire a sa parole, elle
se soumit de bonne grace a sa destinee. Elle trouva cependant (durant
l'operation) une grande consolation dans la pensee que son histoire
restait en grande partie inachevee, et que, par sa petulance, sa brute
de mari s'etait justement puni lui-meme en se privant du recit d'un
grand nombre d'autres merveilleuses aventures.
MELLONTA TAUTA
(ce qui doit arriver)
_A bord du Ballon l'Alouette_,
1 avril, 2848.
Il faut aujourd'hui, mon cher ami, que vous subissiez, pour vos peches,
le supplice d'un long bavardage. Je vous declare nettement que je vais
vous punir de toutes vos impertinences, en me faisant aussi ennuyeux,
aussi decousu, aussi incoherent, aussi insupportable que possible.
Me voila donc encaque dans un sale ballon, avec une centaine ou deux de
passagers appartenant a la _canaille_, tous engages dans une partie de
plaisir (quelle bouffonne idee certaines gens se font du plaisir!) et
ayant devant moi la perspective de ne pas toucher la _terre ferme_ avant
un mois au moins. Personne a qui parler. Rien a faire. Or quand on n'a
rien a faire, c'est le cas de correspondre avec ses amis. Vous comprenez
donc le double motif pour lequel je vous ecris cette lettre:--mon ennui
et vos peches.
Ajustez vos lunettes et preparez-vous a vous ennuyer. J'ai l'intention
de vous ecrire ainsi chaque jour pendant cet odieux voyage.
Mon Dieu! quand donc quelque nouvelle _Invention_ germera-t-elle dans
le pericrane humain? Serons-nous donc eternellement condamnes aux mille
inconvenients du ballon?
_Personne_ ne trouvera donc un systeme de locomotion plus expeditif?
Ce train de petit trot est, a mon avis, une veritable torture. Sur ma
parole, depuis que nous sommes partis, nous n'avons pas fait plus de
cent milles a l'heure. Les oiseaux memes nous battent, quelques-uns
au moins. Je vous assure qu'il n'y a la aucune exageration. Notre
mouvement, sans doute, semble plus lent qu'il n'est reellement--et cela,
parce que nous n'avons autour de nous aucun point de comparaison qui
puisse nous faire juger de notre rapidite, et que nous marchons avec le
vent. Assurement, toutes les fois que nous rencontrons un autre ballon,
nous avons alors quelque chance de nou
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