de vin. Le Duc escamote une carte.
"_C'est a vous a faire_", dit sa Majeste, coupant. Sa Grace s'incline,
donne les cartes et se leve de table _en presentant le Roi_.
Sa Majeste parut chagrinee.
Si Alexandre n'avait pas ete Alexandre, il eut voulu etre Diogene. Le
Duc, en prenant conge de son adversaire, lui assura "_que s'il n'avait
pas ete De l'Omelette, il eut volontiers consenti a etre le Diable._"
LE MILLE ET DEUXIEME CONTE DE SCHEHERAZADE
"_La verite est plus etrange que la fiction._" (Vieux dicton.)
J'eus dernierement l'occasion dans le cours de mes recherches
Orientales, de consulter le _Tellmenow Isitsoornot_, ouvrage a peu pres
aussi inconnu, meme en Europe, que le _Zohar_ de Simeon Jochaides, et
qui, a ma connaissance, n'a jamais ete cite par aucun auteur americain,
excepte peut-etre par l'auteur des _Curiosites de la Litterature
americaine_. En parcourant quelques pages de ce tres remarquable
ouvrage, je ne fus pas peu etonne d'y decouvrir que jusqu'ici le monde
litteraire avait ete dans la plus etrange erreur touchant la destinee
de la fille du vizir, Scheherazade, telle qu'elle est exposee dans les
_Nuits Arabes_, et que le _denoument_, s'il ne manque pas totalement
d'exactitude dans ce qu'il raconte, a au moins le grand tort de ne pas
aller beaucoup plus loin.
Le lecteur, curieux d'etre pleinement informe sur cet interessant sujet,
devra recourir a l'_Isitsoornot_ lui-meme; mais on me pardonnera de
donner un sommaire de ce que j'y ai decouvert.
On se rappellera que, d'apres la version ordinaire des _Nuits Arabes_,
un certain monarque, ayant d'excellentes raisons d'etre jaloux de la
reine son epouse, non seulement la met a mort, mais jure par sa barbe
et par le prophete d'epouser chaque nuit la plus belle vierge de son
royaume, et de la livrer le lendemain matin a l'executeur.
Apres avoir pendant plusieurs annees accompli ce voeu a la lettre,
avec une religieuse ponctualite et une regularite methodique, qui lui
valurent une grande reputation d'homme pieux et d'excellent sens, une
apres-midi il fut interrompu (sans doute dans ses prieres) par la visite
de son grand vizir, dont la fille, parait-il, avait eu une idee.
Elle s'appelait Scheherazade, et il lui etait venu en idee de delivrer
le pays de cette taxe sur la beaute qui le depeuplait, ou, a l'instar de
toutes les heroines, de perir elle-meme a la tache.
En consequence, et quoique ce ne fut pas une annee bissextile (ce
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