es amis. Sieyes n'en put
nommer aucun qui meritat quelque confiance. Larevelliere lui parla alors
avec le ton d'un homme indigne de voir le directoire trahi par ses
membres, et livre par eux aux complots des factieux. Il prouva
que jusqu'ici sa conduite et celle de ses collegues avaient ete
irreprochables, que les torts qu'on leur imputait n'etaient qu'un
tissu de calomnies, puis il attaqua directement Sieyes sur ses projets
secrets, et le jeta dans le plus grand embarras par ses vehementes
apostrophes. Barras, pendant tout ce temps, garda le plus morne silence.
Sa position etait difficile, car seul il avait merite tous les reproches
dont on accablait ses collegues. Leur demander leur demission pour des
torts qu'ils n'avaient pas, et qui n'etaient qu'a lui seul, eut ete
trop embarrassant. Il se tut donc. On se separa sans avoir rien obtenu.
Merlin, qui n'osait pas prendre un parti, avait declare qu'il suivrait
l'exemple de Larevelliere.
Barras imagina d'employer un intermediaire pour obtenir la demission de
ses deux collegues. Il se servit d'un ancien girondin, Bergoeng, que le
gout des plaisirs avait attire dans sa societe. Il le chargea d'aller
voir Larevelliere pour le decider a se demettre. Bergoeng vint dans la
nuit du 20 au 30, invoqua aupres de Larevelliere l'ancienne amitie qui
les liait, et employa tous les moyens pour l'ebranler. Il lui assura que
Barras l'aimait, l'honorait, et regardait son eloignement comme injuste,
mais qu'il le conjurait de ceder, pour n'etre pas expose a une tempete.
Larevelliere demeura inebranlable. Il repondit que Barras etait dupe
de Sieyes, Sieyes de Barras, et que tous deux seraient dupes par
les Bonaparte; qu'on voulait la ruine de la republique, mais qu'il
resisterait jusqu'a son dernier soupir.
Le lendemain 30, Gohier devait etre installe. Les quatre directeurs
etaient reunis; tous les ministres etaient presens. A peine
l'installation fut-elle achevee, et les discours du president et du
nouveau directeur prononces, qu'on revint a l'objet de la veille. Barras
demanda a parler en particulier a Larevelliere; ils passerent tous deux
dans une salle voisine. Barras renouvela aupres de son collegue les
memes instances, les memes caresses, et le trouva aussi obstine. Il
rentra, assez embarrasse de n'avoir rien obtenu, et craignant toujours
la discussion des actes de l'ancien directoire, qui ne pouvait pas etre
a son avantage. Alors il prit la parole avec violence, et n'osant pas
att
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