er leurs projets. Le choix de Joubert etait
fort bon sans doute, mais c'etait une nouvelle injustice pour Moreau,
qui avait si genereusement accepte le commandement d'une armee battue,
et qui l'avait sauvee avec tant d'habilete. Mais Moreau etait peu
agreable aux chauds patriotes, qui triomphaient dans ce moment. On lui
donna le commandement d'une pretendue armee du Rhin qui n'existait pas
encore.
Il y eut en outre divers changemens dans le ministere. Le ministre
des finances, Ramel, qui avait rendu de si grands services depuis
l'installation du directoire, et qui avait administre pendant cette
transition si difficile du papier-monnaie au numeraire, Ramel avait
partage l'odieux jete sur l'ancien directoire. Il fut si violemment
attaque, que, malgre l'estime qu'ils avaient pour lui, les nouveaux
directeurs furent obliges d'accepter sa demission. On lui donna pour
successeur un homme qui etait cher aux patriotes, et respectable pour
tous les partis: c'etait Robert Lindet, l'ancien membre du comite de
salut public, si indecemment attaque pendant la reaction. Il se defendit
long-temps contre la proposition d'un portefeuille: l'experience qu'il
avait faite de l'injustice des partis, devait peu l'engager a rentrer
dans les affaires. Cependant il y consentit par devouement a la
republique.
La diplomatie du directoire n'avait pas ete moins blamee que son
administration financiere. On l'accusait d'avoir remis la republique en
guerre avec toute l'Europe, et c'etait bien a tort, si l'on considere
surtout quels etaient les accusateurs. Les accusateurs, en effet,
etaient les patriotes eux-memes, dont les passions avaient engage de
nouveau la guerre. On reprochait surtout au directoire l'expedition
d'Egypte, naguere si vantee, et on pretendait que cette expedition avait
amene la rupture avec la Porte et la Russie. Le ministre Talleyrand,
deja peu agreable aux patriotes, comme ancien emigre, avait encouru
toute la responsabilite de cette diplomatie, et il etait si vivement
attaque qu'il fallut en agir avec lui comme avec Ramel, et accepter sa
demission. On lui donna pour successeur un Wurtembergeois, qui, sous les
apparences de la bonhomie allemande, cachait un esprit remarquable, et
que M. de Talleyrand avait recommande comme l'homme le plus capable de
lui succeder. C'etait M. Reinhard. On a dit que ce choix n'avait ete que
provisoire, et que M. Reinhard n'etait la qu'en attendant le moment ou
M. de Talleyrand pourrait etre rappe
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