plus nombreuses qu'aujourd'hui. On envoyait en
avant des eclaireurs et des espions pour savoir ou et comment se
diriger. Souvent, les Cosaques apparaissaient dans les endroits ou
ils etaient le moins attendus; alors, tout ce qui etait vivant
disait adieu a la vie. Des incendies devoraient les villages
entiers; les chevaux et les boeufs qu'on ne pouvait emmener
etaient tues sur place. Les cheveux se dressent d'horreur quand on
pense a toutes les atrocites que commettaient les Zaporogues. On
massacrait les enfants, on coupait les seins aux femmes; au petit
nombre de ceux qu'on laissait en liberte, on arrachait la peau, du
genou jusqu'a la plante des pieds; en un mot, les Cosaques
acquittaient en une seule fois toutes leurs vieilles dettes. Le
prelat d'un monastere, qui eut connaissance de leur approche,
envoya deux de ses moines pour leur representer qu'il y avait paix
entre le gouvernement polonais et les Zaporogues, qu'ainsi ils
violaient leur devoir envers le roi et tout droit des gens.
-- Dites a l'abbe de ma part et de celle de tous les Zaporogues,
repondit le _kochevoi_, qu'il n'a rien a craindre. Mes Cosaques ne
font encore qu'allumer leurs pipes.
Et bientot la magnifique abbaye fut tout entiere livree aux
flammes; et les colossales fenetres gothiques semblaient jeter des
regards severes a travers les ondes lumineuses de l'incendie. Des
foules de moines fugitifs, de juifs, de femmes, s'entasserent dans
les villes entourees de murailles et qui avaient garnison.
Les secours tardifs envoyes par le gouvernement de loin en loin,
et qui consistaient en quelques faibles regiments, ou ne pouvaient
decouvrir les Cosaques, ou s'enfuyaient au premier choc, sur leurs
chevaux rapides. Il arrivait aussi que des generaux du roi, qui
avaient triomphe dans mainte affaire, se decidaient a reunir leurs
forces, et a presenter la bataille aux Zaporogues. C'etaient de
pareilles rencontres qu'attendaient surtout les jeunes Cosaques,
qui avaient honte de piller ou de vaincre des ennemis sans
defense, et qui brillaient du desir de se distinguer devant les
anciens, en se mesurant avec un Polonais hardi et fanfaron, monte
sur un beau cheval, et vetu d'un riche _joupan_[28] dont les
manches pendantes flottaient au vent. Ces combats etaient
recherches par eux comme un plaisir, car ils y trouvaient
l'occasion de faire un riche butin de sabres, de mousquets et de
harnais de chevaux. De jeunes hommes au menton imberbe etaient
devenus en u
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