sont plus
precieuses que ma propre vie et que mon propre bonheur. Je sais fort bien
que votre confesseur vous fait un cas de conscience de contrarier mon
devouement pour elle, et de detruire l'effet de mes soins. Sans cela,
votre noble coeur n'eut jamais concu la pensee de compromettre par des
paroles ameres et des reproches injustes le retablissement d'une malade a
peine hors de danger. Mais puisque le fanatisme ou la petitesse d'un
pretre peuvent faire de tels prodiges que de transformer en cruaute
aveugle la piete la plus sincere et la charite la plus pure, je
m'opposerai de tout mon pouvoir au crime dont ma pauvre tante consent a
se faire l'instrument. Je garderai ma malade la nuit et le jour, je ne la
quitterai plus d'un instant; et si malgre mon zele on reussit a me
l'enlever, je jure, par tout ce qu'il y a de plus redoutable a la croyance
humaine, que je sortirai de la maison de mes peres pour n'y jamais
rentrer. Je pense que quand vous aurez fait connaitre ma determination
a M. le chapelain, il cessera de vous tourmenter et de combattre les
genereux instincts de votre coeur maternel."
La chanoinesse stupefaite ne put repondre a ce discours qu'en fondant en
larmes. Albert l'avait emmenee a l'extremite de la galerie, afin que cette
explication ne fut pas entendue de Consuelo. Elle se plaignit vivement
du ton de revolte et de menace que son neveu prenait avec elle, et voulut
profiter de l'occasion pour lui demontrer la folie de son attachement pour
une personne d'aussi basse extraction que la Nina.
"Ma tante, lui repondit Albert en souriant, vous oubliez que si nous
sommes issus du sang royal des Podiebrad, nos ancetres les monarques
ne l'ont ete que par la grace des paysans revoltes et des soldats
aventuriers. Un Podiebrad ne doit donc jamais voir dans sa glorieuse
origine qu'un motif de plus pour se rapprocher du faible et du pauvre,
puisque c'est la que sa force et sa puissance ont plante leurs racines,
il n'y a pas si longtemps qu'il puisse deja l'avoir oublie."
Quand Wenceslawa raconta au chapelain cette orageuse conference, il fut
d'avis de ne pas exasperer le jeune comte en insistant aupres de lui, et
de ne pas le pousser a la revolte en tourmentant sa protegee.
"C'est au comte Christian lui-meme qu'il faut adresser vos
representations, dit-il. L'exces de votre tendresse a trop enhardi le
fils; que la sagesse de vos remontrances eveille enfin l'inquietude du
pere, afin qu'il prenne a l'egard de la _da
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