qu'ils avaient de plus riche en galons d'or et d'argent, en rubans et en
plumes, comme dans les receptions les plus solennelles. L'officier, a la
vue d'un concours si nombreux et si imposant, parut interdit et devint
presque tremblant. Il se mit alors a lire la depeche de l'amiral, dont
le ton hautain et imperieux contrastait de la maniere la plus plaisante
avec l'air terrifie du mandataire, et comme l'amiral concluait en
demandant qu'il lui fut repondu dans une heure, Frontenac, d'une voix
tonnante, s'ecria qu'il ne le ferait pas attendre si longtemps et qu'il
lui repondrait, non par ecrit, mais par la bouche de ses canons. Ceci se
passait le 15 octobre 1690.
Le 16, 2,000 Anglais debarquerent a la riviere Saint-Charles. Vers le
soir, on entendit dans la haute ville un grand bruit de roulement de
tambours et de fifres: c'etaient les gens de Montreal qui arrivaient,
au nombre de 800, avec M. de Longueuil, M. de Sainte-Helene et M. de
Maricourt. Ils etaient accompagnes d'un grand nombre de coureurs de bois
et de volontaires chantant et poussant des cris de guerre en entrant
dans la ville. Un prisonnier francais, a bord du vaisseau amiral, dit a
l'amiral: "Vous avez perdu votre chance; ce sont les gens de Montreal
qui arrivent." Le jour suivant, les Anglais campes a la riviere
Saint-Charles se mirent en marche, et alors, de plusieurs bosquets de
bois partirent des feux de peloton qui ecraserent les assaillants;
il leur semblait que chaque arbre cachait un sauvage arme, et ils ne
savaient comment viser leurs adversaires.
Phipps, voyant que cette attaque ne reussissait pas, amena tous les
vaisseaux devant la ville et commenca a tirer. L'attaque etait dirigee
avec une telle vigueur que de vieux officiers declarerent qu'ils
n'avaient jamais entendu une pareille canonnade. Le bruit etait repete
par les montagnes et se prolongeait comme les roulements du tonnerre,
mais l'effet etait nul et les boulets se perdaient sur les rocs de la
ville.
Sainte-Helene et Maricourt, qui etaient revenus de la riviere
Saint-Charles, dirigeaient le tir des canons de la basse ville, Aux
premiers coups, ils atteignirent le pavillon du vaisseau amiral, qui
tomba dans le fleuve; le courant le porta sur la rive, et aussitot
un canot d'ecorce alla le prendre sous le feu de la mousqueterie des
Anglais, et il fut porte a la cathedrale; il y est reste jusqu'en 1760.
Bientot les vaisseaux anglais furent cribles de coups et desempares, et
l'amiral
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