mais
en rapport avec les frais que d'Iberville avait faits pour cette
expedition; ce qui etait tout a fait juste.
Ils partirent chacun de son cote: M. de Brouillan par mer, M.
d'Iberville par terre. Ils devaient se reunir au port de Rognouse, a
quelques lieues au sud de Saint-Jean. M, l'abbe Beaudoin accompagnait
les Canadiens; il fit tout le voyage a pied, en un mot, en raquettes,
comme les combattants; il assista a tous les engagements, et c'est ainsi
qu'il a pu recueillir tous les faits qu'il a consignes dans le recit si
interessant que l'on retrouve dans les ouvrages de M. de La Potherie et
du Pere Charlevoix.
M. d'Iberville partit de Plaisance le 1er novembre. Il parcourut un
terrain marecageux, a demi gele et ou il trouva bien des difficultes;
mais ce trajet avait aguerri ses gens et les avait habitues a la marche.
Il arriva a Rognouse le 12 de novembre et y trouva M. de Brouillan, qui
voulut essuyer encore d'une nouvelle contradiction: il declara donc
a d'Iberville qu'il ne lui accorderait que la moitie des prises de
Saint-Jean.
Cette decision fut si mal recue, que M. de Brouillan vit qu'il etait a
craindre que M. d'Iberville ne se retirat avec ses gens, qui voulaient
le suivre a tout prix. Il changea alors de langage, et il declara qu'il
se desistait.
Aussitot d'Iberville prit les resolutions qu'il jugea les meilleures:
c'etait d'attaquer par terre les stations ou l'on avait un facile acces
par les habitations. Apres avoir pris les provisions du _Profond_, il le
fit partir pour transporter les prisonniers, tandis que lui-meme n'en
avait plus besoin, puisque le gouverneur le laissait operer par terre.
Mais ici, il y eut encore un changement inopine. Le _Profond_ etant
parti, M. de Brouillan ne craignit plus que d'Iberville en profitat pour
se retirer s'il etait mecontent; alors il declara que tous les Canadiens
seraient sous ses ordres et que les volontaires iraient ou ils
voudraient avec M. d'Iberville.
Le Pere Charlevoix nous fait admirer le noble caractere de d'Iberville.
Sans aucune reclamation ni plainte, il supporta en silence cette
nouvelle incartade. Il prit le parti de patienter encore et de laisser
le gouverneur seul dans son tort. Il ne craignait qu'une chose: c'etait
de n'avoir pas assez d'autorite sur ses gens pour les empecher de se
revolter apres tant de palinodies.
Cette moderation fit reflechir M. de Brouillan, et, tres inquiet du ce
qui arriverait s'il etait prive du concours de
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