eras le tout dans le cercueil en pierre qui se trouve
dans le jardin, tu sais..., le cercueil gallo-romain!
-- Oui, mon cousin.
-- Et tu glisseras a mes cotes cette bourse en cuir qui contient
ma collection de monnaies grecques: c'est comme ca que je veux
etre enterre.
-- Oui, mon cousin.
-- Dans cinq ou six cents ans, quand les archeologues du temps me
deterreront, crois-tu qu'ils en feront une gueule, hein! Un
guerrier chinois avec des pieces grecques dans un cercueil gallo-
romain?
Et mon cousin, malgre la maladie, riait aux larmes, a l'idee de la
gueule que feraient les archeologues, dans cinq cents ans.
-- Je ne suis pas curieux, ajoutait-il, mais je voudrais bien lire
le rapport que ces imbeciles redigeront sur cette decouverte.
Peu de jours apres, mon cousin mourut.
Le lendemain de son enterrement, nous apprimes que toute sa
fortune etait en viager.
Ce detail contribua a adoucir fortement les remords que j'ai de
n'avoir pas glisse dans le cercueil en pierre la collection de
monnaies grecques (la plupart en or).
Autant que ca me profite a moi, me suis-je dit, qu'a des
archeologues pas encore nes.
TRUC CANAILLE
Durant l'annee 187... ou 188... (le temps me manque pour determiner
exactement cette epoque penible) le Pactole inonda desesperement
peu le modeste logement que j'occupais dans les parages du
Luxembourg (le jardin, pas le grand-duche).
Ma famille (de bien braves gens, pourtant), vexee de ne pas me
voir passer plus d'examens brillants (a la rigueur, elle se serait
contentee d'examens ternes), m'avait coupe les vivres comme avec
un rasoir.
Et je gemissais dans la necessite, l'indigence et la penurie.
Mes seules ressources (si l'on peut appeler ca des ressources)
consistaient en chroniques completement loufoques que j'ecrivais
pour une espece de grand serin d'etudiant, lequel les signait de
son nom dans le Hanneton de la rive gauche (organe disparu
depuis).
Le grand serin me remunerait a l'aide de bien petites sommes, mais
je me vengeais delicieusement de son rapiatisme en couchant avec
sa maitresse, une fort jolie fille qu'il epousa par la suite.
C'etait le bon temps.
On avait bon appetit, on trouvait tout succulent, et l'on etait
heureux comme des dieux quand, le soir, on avait reussi a derober
un pot de moutarde a Canivet, marchand de comestibles dont le
magasin se trouvait un peu au-dessus du lycee Saint-Louis, pres du
Sherry-Gobbler.
La seule chose qui m'
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