, et reniemens: lequel le vice-roy de
Sicile, envoya un soir, en un monastere pour querir une salade d'herbes: en
chemin soudain il fut ravy en l'air, et on ne le vit plus. Un peu de temps
apres un navire passoit aupres de ceste montagne, et voicy une voix qui
appelle par deux fois le patron du navire, et voyant qu'il ne respondoit
point pour la troisieme, ouit que s'il n'arrestoit il enfondroit le navire.
Le patron demande ce qu'il vouloit, qui respondit: Je suis le diable, et di
au vice-roy qu'il ne cerche plus un tel jeune homme, car je l'ay emporte,
et est icy avec nous: voicy la ceinture de sa femme qu'il avoit prinse pour
jouer; laquelle ceinture il jette sur le navire."
IV.--METAMORPHOSES DU DIABLE
Le diable apparait sous toutes sortes de figures.
"Que diray-je davantage? lit-on dans l'ouvrage de Le Loyer[1]. Il n'y a
sorte de bestes a quatre pieds que le diable ne prenne, ce que les hermites
vivans es deserts ont assez eprouve. A sainct Anthoine qui habitoit es
deserts de la Thebaide les loups, les lions, les taureaux se presentoient a
tous bouts de champ; et puis a sainct Hilarion faisant ses prieres se
monstroit tantost un loup qui hurloit, tantost un regnard qui glatissoit,
tantost un gros dogue qui abbayoit. Et quoy? le diable n'auroit-il pas ete
si impudent mesmes, que ne pouvant gaigner les hermites par cette voye, il
se seroit montre, comme il fit a sainct Anthoine, en la forme que Job le
depeint sous le nom de Leviathan, qui est celle qui lui est comme naturelle
et qu'il a acquise par le peche, voire qui lui demeurera es enfers avec les
hommes damnes. Ce n'est point des animaux a quatre pieds seulement que les
diables empruntent la figure, ils prennent celles des oyseaux, comme de
hiboux, chahuans, mouches, tahons... Quelquefois les diables s'affublent de
choses inanimees et sans mouvement, comme feu, herbes, buissons, bois, or,
argent et choses pareilles... Je ne veux laisser que quand les esprits
malins se monstrent ils ne gardent aucune proportion parce qu'ils sont
enormement grands et petits comme ils sont gros et greles a l'extremite."
[Note 1: _Discours et histoires des spectres, etc._ p. 353.]
"J'ai entendu, dit Jean Wier, cite par Goulart[1], que le diable tourmenta
durant quelques annees les nonnains de Hessimont a Nieumeghe. Un jour il
entra par un tourbillon en leur dortoir, ou il commenca un jeu de luth et
de harpe si melodieux, que les pieds fretilloyent aux nonnains pour
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