choses veritables. Mais quelqu'un lui ayant dit: Si tu veux qu'on te croye
dis _Miserere mei Deus, secundum magnam misericordiam tuam_. Sa reponse
fut: Je ne puis. Alors les assisants se mocquerent de lui, qui s'enfuit en
fremissant."
Le diable prend meme parfois la forme de personnes vivantes.
Voici par exemple ce que rapporte Loys Lavater[1]:
[Note 1: _Trois livres des apparitions des esprits, fantasmes,
prodiges, etc., composez par Loys Lavater, plus trois questions
proposees et resolues par M. Pierre Martyr_. Geneve, Fr. Perrin,
1571, in-12.]
"J'ai oui dire a un homme prudent et honnorable baillif d'une seigneurie
dependante du Zurich, qui affirmoit qu'un jour d'este allant de grand matin
se promener par les prez, accompagne de son serviteur, il vid un homme
qu'il cognoissoit bien, se meslant meschamment avec une jument: de quoy
merveilleusement estonne retourna soudainement, et vint frapper a la porte
de celuy qu'ils pensoyent avoir veu, ou il trouva pour certain qu'il
n'avoit bouge de son lict. Et si ce bailli, n'eust diligemment seu la
verite, un bon et honneste personnage eust este emprisonne et gehenne. Je
recite ceste histoire, afin que les juges soyent bien avisez en tels cas.
Chunegonde, femme de l'empereur Henry second, fut soupeconnee d'adultere,
et le bruit courut qu'elle s'accointoit trop familierement d'un gentilhomme
de la cour. Car on avoit veu souvent la forme d'iceluy (mais c'estoit le
diable qui avoit pris ce masque) sortant de la chambre de l'empereur. Elle
monstra peu apres son innocence en marchant sur des grilles de fer toutes
ardentes (comme la coutume estoit alors) et ne se fit aucun mal."
"En l'ile de Sardaigne, dit P. de Lancre[1] et en la ville de Cagliari, une
fille de qualite, de fort riche et honnorable maison, ayant veu un
gentilhomme d'une parfaicte beaute et bien accompli en toute sorte de
perfections s'amouracha de luy, et y logea son amitie avec une extreme
violence. (Elle sut dissimuler et le gentilhomme ne s'apperceut de rien).
Un mauvais demon pipeur, plus instruit en l'amour et plus affronteur que
luy, embrassant cette occasion, recognut aisement que cette fille esprise
et combatue d'amour seroit bientot abbatue... Et pour y parvenir plus
aisement, il emprunta le masque et le visage du vray gentilhomme, prenant
sa forme et figure, et se composa du tout a sa facon, si bien qu'on eut dit
que c'estoit non seulement son portrait, mais un autre luy-meme. Il l
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