ant. Il fut surpris, se leva,
s'ecria:
--Ah! Bondel! Quelle chance!
Et Bondel, embarrasse, repondit:
--Oui, mon cher, je suis venu faire quelques courses a Paris et je
suis monte pour vous serrer la main.
--Ca c'est gentil, gentil! D'autant plus que vous aviez un peu perdu
l'habitude d'entrer chez moi.
--Que voulez-vous, on subit malgre soi des influences, et comme ma
femme avait l'air de vous en vouloir!
--Bigre ... avait l'air,... elle a fait mieux que cela, puisqu'elle
m'a mis a la porte.
--Mais a propos de quoi? Je ne l'ai jamais su, moi.
--Oh! a propos de rien ... d'une betise ... d'une discussion ou je
n'etais pas de son avis.
--Mais a quel sujet cette discussion?
--Sur une dame que vous connaissez peut-etre de nom; Mme Boutin, une
de mes amies.
--Ah! Vraiment.... Eh bien! je crois qu'elle ne vous en veut plus, ma
femme, car elle m'a parle de vous, ce matin, en termes fort amicaux.
Tancret eut un tressaillement, et parut tellement stupefait que
pendant quelques instants il ne trouva rien a dire. Puis il reprit:
--Elle vous a parle de moi ... en termes amicaux....
--Mais oui.
--Vous en etes sur?
--Parbleu?... je ne reve pas.
--Et puis?...
--Et puis ... comme je venais a Paris, j'ai cru vous faire plaisir en
vous le disant.
--Mais oui.... Mais oui....
Bondel parut hesiter, puis, apres un petit silence:
--J'avais meme une idee ... originale.
--Laquelle?
--Vous ramener avec moi pour diner a la maison.
A cette proposition, Tancret, d'un naturel prudent, parut inquiet.
--Oh! vous croyez ... est-ce possible ... ne nous exposons-nous pas a
... a ... des histoires....
--Mais non ... mais non.
--C'est que ... vous savez ... elle a de la rancune, Mme Bondel.
--Oui, mais je vous assure qu'elle ne vous en veut plus. Je suis meme
convaincu que cela lui fera grand plaisir de vous voir comme ca, a
l'improviste.
--Vrai?
--Oh! vrai.
--Eh bien! allons, mon cher. Moi, je suis enchante. Voyez-vous, cette
brouille-la me faisait beaucoup de peine.
Et ils se mirent en route vers la gare Saint-Lazare en se tenant par
le bras.
Le trajet fut silencieux. Tous deux semblaient perdus en des songeries
profondes. Assis l'un en face de l'autre, dans le wagon, ils se
regardaient sans parler, constatant l'un et l'autre qu'ils etaient
pales.
Puis ils descendirent du train et se reprirent le bras, comme pour
s'unir contre un danger. Apres quelques minutes de marche il
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